Fiscalité Entreprise : quels impôts payer en ligne ?

Fiscalité Entreprise : quels impôts payer en ligne ?

Entreprises : quels impôts payer en ligne ?

L’utilisation des téléprocédures est obligatoire pour déclarer et payer la plupart des impôts professionnels. Cette obligation s’applique-t-elle à votre entreprise ? Quels sont les impôts que vous devez payer en ligne ? On fait le point.

Devez-vous payer vos impôts en ligne ?

Toutes les entreprises relevant d’un régime réel d’imposition, normal ou simplifié doivent obligatoirement avoir recours aux téléprocédures pour  souscrire leurs déclarations professionnelles et payer leurs différentes échéances.

Deux options s’offrent à vous : les services en ligne proposés sur impots.gouv.fr via votre espace professionnel et la procédure EDI (échanges des données informatisé).

Notez que si vous relevez du régime de la micro-entreprise, vous déclarez vos revenus différemment.

 

L’espace professionnel sur impots.gouv.fr

Afin de pouvoir utiliser les téléprocédures, il est nécessaire de disposer d’un espace professionnel sur impots.gouv.fr. Pour créer votre compte ou y accéder :

  1. cliquez sur « votre espace professionnel » sur le site impots.gouv.fr,
  2. connectez-vous à l’aide de vos identifiants ou créez votre espace en choisissant votre mode : 
    • le mode simplifié : pour les usagers souhaitant créer un espace pour le compte de leur propre entreprise et n’ayant pas besoin d’un partage de gestion entre plusieurs usagers,
    • le mode expert : pour les usagers ayant à gérer plusieurs entreprises, et notamment pour les experts-comptables ou les prestataires (« partenaires EDI »).

 

La procédure EDI

La procédure EDI, pour « échange des données informatisé », doit être utilisé si vous avez recours aux services d’un tiers pour votre comptabilité/gestion (expert-comptable, centre de gestion agréé, association de gestion agréée, etc.…). Ce dernier est habilité à dématérialiser vos déclarations, assorties, le cas échéant, d’un paiement. Il les transmet à l’administration fiscale par l’intermédiaire d’un prestataire technique, le partenaire EDI.

 

Quels sont les impôts concernés ?

Tableau récapitulatif des principaux impôts à déclarer et payer en ligne

Vos démarches en ligne Le recours à la téléprocédure est-il obligatoire ? Quels modes utiliser ?
Déclarations de résultats : bénéfices agricoles soumis au régime simplifié d’imposition (BA RSI), bénéfices industriels et commerciaux sous le régime simplifié d’imposition (BIC RSI), impôt sur les sociétés au régime simplifié d’imposition (IS RSI) et bénéfices non commerciaux (BNC) Obligatoire pour toutes les entreprises concernées

En ligne sur impots.gouv.fr ou par l’intermédiaire d’un partenaire EDI

Déclarations de résultats : bénéfices industriels et commerciaux soumis au régime normal (BIC RN), impôt sur les sociétés au régime normal (IS RN) et bénéfices agricoles soumis au régime normal (BA RN) Obligatoire pour toutes les entreprises concernées Par l’intermédiaire d’un partenaire EDI
Déclaration et paiement de la TVA Obligatoire pour toutes les entreprises En ligne sur impots.gouv.fr ou par l’intermédiaire d’un partenaire EDI
Demande de remboursement de crédit de la TVA Obligatoire pour toutes les entreprises

En ligne sur impots.gouv.fr ou par l’intermédiaire d’un partenaire EDI

Déclaration de la TVA sur les services électroniques due dans les autres États membres de l’Union européenne Obligatoire pour les entreprises concernées

En ligne sur impots.gouv.fr (mini-guichet TVA UE)

Paiement de l’impôt sur les sociétés (IS) Obligatoire pour toutes les entreprises soumises à l’IS Les acomptes d’IS sont versés par voie électronique
Paiement de la taxe sur les salaires (TS) Obligatoire pour toutes les entreprises redevables En ligne sur impots.gouv.fr ou par l’intermédiaire d’un prestataire EDI
Déclaration et paiement de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) Obligatoire pour toutes les entreprises redevables En ligne sur impots.gouv.fr ou par l’intermédiaire d’un partenaire EDI
Paiement de la cotisation foncière des entreprises (CFE) Obligatoire pour toutes les entreprises redevables En ligne sur impots.gouv.fr ou prélèvement automatique (mensuel ou à l’échéance)
Paiement de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (Ifer)        Obligatoire pour toutes les entreprises redevables En ligne sur impots.gouv.fr ou prélèvement automatique (mensuel ou à l’échéance)
Paiement des taxes foncières :

taxe foncière sur le bâti et taxe foncière sur les propriétés non bâties

Obligatoire selon le montant à payer En ligne sur impots.gouv.fr ou prélévement automatique (mensuel ou à l’échéance selon le montant)

 

Quels sont les délais pour payer en ligne ?

Vous bénéficiez d’un délai supplémentaire de cinq jours après la date limite de paiement pour payer directement en ligne vos taxes foncières. La somme est prélevée sur votre compte bancaire au moins 10 jours après la date de limite de paiement (le lendemain pour la CFE et/ou l’Ifer).

Les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés qui télédéclarent disposent d’un délai supplémentaire de 15 jours pour souscrire leurs déclarations de résultats.

 

Sources : © Economie.Gouv 2024 – Retrouvez d’autres d’actualités sur le blog de l’Atwo Conseil !

Déclaration de revenus 2023 : les dates limites

Déclaration de revenus 2023 : les dates limites

Déclaration de revenus 2023 : les dates limites

La campagne de déclaration est ouverte depuis jeudi 11 avril 2024. Il est donc possible de déclarer en ligne vos revenus de 2023, jusqu’à une date limite fixée selon le département (adresse du domicile au 1er janvier 2024) :

  • Jeudi 23 mai 2024 à 23h59 : pour les départements 01 à 19 et les non-résidents ;
  • Jeudi 30 mai 2024 23h59 : pour les départements 20 à 54 ;
  • Jeudi 6 juin 2024 à 23h59 : pour les départements 55 à 976.

Pour les contribuables qui souscrivent une déclaration « papier » , la date limite de dépôt des déclarations est fixée au mardi 21 mai 2024 à 23h59, quel que soit le lieu de résidence (y compris pour les Français résidant à l’étranger), le cachet de La Poste faisant foi.

Pour rappel, vous pouvez faire une déclaration papier si :

  • Votre résidence principale n’est pas équipée d’un accès internet ;
  • Vous vivez dans une zone où aucun service mobile n’est disponible ;
  • Votre résidence principale est bien équipée d’un accès à internet mais vous n’êtes pas en mesure d’utiliser correctement le service de télédéclaration ;
  • Vous avez explicitement manifesté votre volonté de recevoir une déclaration papier.

 

Deux nouveautés majeures à compter de la déclaration de revenus 2023 :

  • Enfants majeurs ou mariés qui sont rattachés au foyer fiscal de leurs parents : l’adresse complète des enfants majeurs (ou mariés) rattachés doit être indiquée si elle est différente de celle des parents ;
  • Déclaration des biens immobiliers : un questionnaire obligatoire est inséré en fin de parcours de la déclaration en ligne. Les propriétaires devront indiquer si des changements d’occupation de leurs biens ont eu lieu. Dans l’affirmative, ils seront dirigés automatiquement vers le service « Gérer mes biens immobiliers ».

 

Sources : © Editions Francis Lefebvre 2024 – Retrouvez d’autres d’actualités sur le blog de l’Atwo Conseil !

Congés payés : dernières évolutions

Congés payés : dernières évolutions

Congés payés : les dernières évolutions

Les Sages jugent les dispositions du Code du travail relatives au droit à congés payés en cas de maladie conformes à la Constitution. Elles n’en restent pas moins non conformes au droit de l’Union européenne. Le gouvernement vient donc de proposer, par voie au projet de loi DDADUE, un aménagement des textes.

Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 8 février 2024 (Décision 2023-1079 QPC), a validé les dispositions du Code du travail faisant obstacle à l’acquisition de congés payés au cours de périodes d’arrêt maladie d’origine non professionnelle en les déclarant conformes à la Constitution. Néanmoins, ces dispositions restent contraires au droit de l’Union européenne, et la France devra forcément se mettre en conformité. Les entreprises restent donc dans l’incertitude des conséquences des arrêts rendus par la Cour de cassation le 13 septembre 2023 (Cass. soc. 13-9-2023 n°22-17.340, n°22-17.638 et n°22-10.529). Dans l’attente, d’un point de vue comptable, c’est le droit européen qui s’applique aux clôtures 2023. 

 

En septembre 2023, la Cour de cassation a jugé le Code du travail non conforme au droit européen

Pour rappel, par plusieurs arrêts du 13 septembre 2023 au fort retentissement, la Cour de cassation a mis en conformité le droit national avec le droit de l’Union européenne concernant la question de l’acquisition de droits à congés payés pour des salariés en arrêt maladie d’origine professionnelle ou non professionnelle.

Les arrêts de la Cour de cassation du 13 septembre 2023 opèrent en effet un revirement de jurisprudence important, dont il faut retenir 3 points majeurs :

  • d’une part, la Cour de cassation a jugé que les salariés en arrêt de travail pour maladie ou accident, que ceux-ci soient d’origine professionnelle ou non professionnelle, bénéficient des droits à congés payés au cours de ces périodes d’arrêt ;
  • d’autre part, la Cour a écarté les dispositions de l’article L 3141-5, alinéa 5, du Code du travail qui limitent à un an la durée de l’arrêt pour accident du travail ou maladie professionnelle, permettant d’acquérir des droits à congés payés ;
  • enfin, la Cour précise, concernant le point de départ de la prescription, que, « lorsque l’employeur oppose la fin de non-recevoir tirée de la prescription, le point de départ du délai de prescription de l’indemnité de congés payés doit être fixé à l’expiration de la période légale ou conventionnelle au cours de laquelle les congés payés auraient pu être pris dès lors que l’employeur justifie avoir accompli les diligences qui lui incombent légalement afin d’assurer la possibilité d’exercer effectivement son droit à congé » (n°22-10.529).

Désormais, en application de cette nouvelle jurisprudence, tous les arrêts de travail, quelle qu’en soit l’origine ou la durée, donnent droit à l’acquisition de congés payés.

Rappelons toutefois que le droit européen ne garantit aux travailleurs qu’un droit à congé annuel payé d’au moins 4 semaines, soit 24 jours ouvrables (Dir. 93/104/CE art. 7), alors que le Code du travail accorde, quant à lui, 5 semaines.

 

En février 2024, le Conseil constitutionnel juge le Code du travail conforme à la constitution

Dans sa récente décision, le Conseil constitutionnel ne remet absolument pas en question la décision rendue par les arrêts de la Cour de cassation.

En l’espèce, la Cour de cassation a saisi le Conseil constitutionnel d’une question prioritaire de constitutionnalité, considérant qu’elle présentait un « caractère sérieux », relative à la conformité des articles L 3141-3 et  L 3141-5 du Code du travail aux droits et libertés garantis par la Constitution, et notamment le droit des travailleurs au repos garanti par l’alinéa 11 du préambule de la Constitution de 1946 et au principe d’égalité.

Dans sa décision rendue le 8 février dernier, le Conseil constitutionnel a jugé conformes les dispositions du Code du travail limitant l’acquisition de congés payés pendant les périodes d’arrêt à la Constitution, sans remettre en question les arrêts rendus par la chambre sociale de la Cour de cassation du 13 septembre 2023. 

Pour affirmer la conformité à la Constitution des articles du Code du travail, le Conseil a considéré que, si le principe d’un congé annuel payé est l’une des garanties du droit au repos, le législateur dispose, au regard de la Constitution, d’une liberté de déterminer les conditions de mise en œuvre du congé payé et qu’il a la possibilité, d’une part, de ne pas prévoir de droit à l’acquisition de congés payés en cas d’absence pour maladie non professionnelle et, d’autre part, de limiter a un an la période d’acquisition de congés payés en cas d’absence pour maladie ou accident d’origine professionnelle.

Aussi, le Conseil constitutionnel a jugé que le législateur pouvait prévoir un régime différent d’acquisition des congés payés dans le cas où l’arrêt de travail avait une origine non-professionnelle sans méconnaître le principe d’égalité prévu par la Constitution.

 

Le code du travail n’en reste pas moins non conforme au droit européen…

Il est donc clair que le Conseil constitutionnel et la CJUE n’apprécient pas la portée du droit aux congés payés de la même manière. Cependant, en dépit de la déclaration de conformité à la Constitution des dispositions du Code du travail par les Sages de la rue Montpensier, ces dispositions restent en contradiction avec le droit de l’Union européenne.

Dans ce contexte, certains salariés pourraient tenter de revenir sur des périodes lointaines, avec des conséquences comptables et financières potentiellement importantes pour les entreprises n’ayant pas octroyé de congés payés aux salariés en longue maladie.

Ces conséquences comptables et financières pouvaient paraitre d’autant plus difficiles à évaluer que certaines difficultés d’interprétation avaient été soulevées concernant la prescription de l’action en paiement des indemnités de congés payés, qui relève des règles relatives au paiement des salaires (C. trav. art. D 3141-7), et donc de la prescription triennale de l’article L 3245-1 du Code du travail.

Dans l’un des arrêts du 13 septembre 2023 (n°22-10.529), la Cour de cassation a notamment précisé que le point de départ de la prescription devait être apprécié à l’expiration de la période, légale ou conventionnelle, de prise des congés payés, à la condition que l’employeur ait mis le salarié en mesure d’exercer ce droit en temps utile. Cela signifie qu’en l’absence de fixation et de diligences de la part de l’employeur aucun point de départ du délai de prescription n’existe.

En l’espèce, la Cour a confirmé l’octroi de l’indemnité de congés payés sur une période de 10 ans en considérant que l’employeur n’avait pas accompli les diligences nécessaires pour garantir le droit du salarié aux congés payés. Cependant, la portée de cet arrêt reste incertaine compte tenu de la situation particulière tranchée par la Cour de cassation, qui portait sur une demande de requalification d’un contrat de prestation de services en contrat de travail et, en conséquence, la condamnation de l’employeur au paiement d’indemnités de congés payés pour les périodes de référence afférentes.

Les arrêts de la Cour de cassation du 13 septembre 2023 plaçaient ainsi les entreprises devant de multiples interrogations.

 

… de sorte qu’une réforme législative apparaît inévitable

La décision du Conseil Constitutionnel étant sans incidence sur la solution issue des arrêts de la Cour de cassation, le législateur a entrepris de clarifier la situation en posant un cadre.

C’est dans ce contexte que le Premier ministre a saisi le Conseil d’État d’une demande d’avis portant sur la mise en conformité des dispositions du code du travail en matière d’acquisition de congés payés pendant les périodes d’arrêt maladie (Avis CE 7 et 11-3-2024, n°408112). À la suite de cet avis, le Gouvernement a présenté le 15 mars 2024 un amendement dans le cadre du projet de loi, en discussion devant l’Assemblée nationale, portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière d’économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole.

Il ressort de cet amendement, adopté par l’Assemblée nationale en première lecture le 18 mars 2024 et devenu article 32 bis du projet de loi, que le Gouvernement envisage de limiter :

  • à 2 jours ouvrables par mois l’acquisition des droits à congés payés pendant les périodes de suspension du contrat de travail liées à un arrêt maladie pour raison non professionnelle, afin de se conformer à la durée minimale de 24 jours ouvrables prévue par la directive 93/104/CE ;

    En revanche, en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle, les salariés pourraient continuer à acquérir des droits à congés à hauteur de 2,5 jours ouvrables par mois, au-delà d’un an.

  • à 15 mois la durée de report de l’ensemble des droits à congés payés, comme l’admet la CJUE (CJUE 9-11-2023 aff. 271/22).

Ce projet de texte appelle cependant certaines précisions complémentaires.

 

Pour le passé, les congés payés supplémentaires pour arrêt non professionnel ne devraient pas permettre de dépasser 24 jours

En vue de permettre l’application rétroactive, dans le respect des principes constitutionnels, du nouveau quantum de droits à congés susceptibles d’être acquis durant un arrêt de travail lié à un accident ou une maladie n’ayant pas un caractère professionnel, et conformément à la recommandation du Conseil d’État, le dispositif prévoit que les nouvelles règles ne peuvent, pour chaque période de référence, permettre au salarié d’acquérir des droits à congé supplémentaires durant son arrêt maladie que si le nombre de 24 jours ouvrables de congés annuels payés n’est pas déjà atteint au titre des périodes de travail effectif, et sans pouvoir dépasser ce nombre de 24 jours.

 Exemple : Un salarié absent en raison d’une maladie non professionnelle durant deux mois pendant une période de référence donnée devrait en théorie acquérir (2,5 jours x 10 mois) + (2 jours x 2 mois) = 29 jours ouvrables de congés payés soit 5 jours de plus que ce que prévoit le droit de l’UE. Mais afin de permettre la rétroactivité du texte, le dispositif est limité de telle sorte que ce salarié ne puisse acquérir aucun jour de congé supplémentaire pendant son arrêt maladie, ayant déjà acquis plus de 24 jours de congés payés à raison de sa période de travail effectif sur la période de référence. Dans ce cas, le salarié ne pourra donc acquérir que 25 jours (et non 29).

 

Le délai de report de 15 mois pourrait en cas d’arrêts longue durée entraîner une péremption automatique des droits

En ce qui concerne les modalités d’application du nouveau délai de report de 15 mois, le Conseil d’État souligne dans son avis que le point de départ de ce délai doit en principe correspondre à la fourniture par l’employeur de l’information sur l’étendue des droits à congés, postérieurement à la reprise du travail. Ce principe serait inscrit au nouvel article L 3141-19-1 du Code du travail.

Ainsi, les congés payés acquis avant un arrêt de travail, mais non pris en raison de cet arrêt pourraient être reportés sur une période de 15 mois débutant à la date à laquelle le salarié reçoit, postérieurement à sa reprise du travail, l’information requise de l’employeur.

Il en serait en principe de même s’agissant des congés acquis durant l’arrêt de travail. Toutefois, si le contrat de travail est suspendu depuis au moins un an à la fin de la période de référence au titre de laquelle ces congés ont été acquis, le nouveau texte prévoit que le point de départ du délai de report débuterait à la date à laquelle s’achève cette période de référence. En cas de reprise du travail par le salarié durant la période de report, cette dernière serait suspendue jusqu’à ce que le salarié reçoive de son employeur les informations relatives à ses droits à congés. Ce n’est qu’en l’absence de reprise du travail par le salarié durant la période de report qu’interviendrait la péremption automatique des droits à congés à l’issue du délai de 15 mois décompté depuis la fin de la période de référence d’acquisition des congés.

Il ressort de l’avis du Conseil d’État qu’une telle exception ne serait envisageable qu’afin de faire obstacle à certaines circonstances spécifiques qui, à défaut, entraineraient l’acquisition de droits à congé s’additionnant de manière illimitée et ne répondant plus aux finalités du congé annuel. La CJUE a en effet admis une telle péremption automatique en cas d’absence maladie pendant une très longue durée, correspondant à plusieurs périodes consécutives d’acquisition de droits (CJUE 22-11-2011, aff. C-214/10, KHS). Son extension à d’autres cas tels que le cumul de droits sur de très longues périodes ou le report de droits acquis depuis une période très ancienne est une hypothèse envisagée par le Conseil d’État dans son avis, sans toutefois qu’il ne préjuge de la jurisprudence de la CJUE.

 Exemple : Un salarié en arrêt de travail pour motif non professionnel du 1er juin 2010 au 1er juillet 2013 aura acquis les droits suivants :

  • pour la période de référence achevée au 31 mai 2011 : 24 jours de congés payés, reportables sur 15 mois soit jusqu’au 31 août 2012. Le salarié, étant absent depuis un an à la fin de la période de référence et n’ayant pas repris le travail au 31 août 2012, les droits sont périmés à cette date.
  • pour la période de référence achevée au 31 mai 2012 : 24 jours de congés payés, reportables sur 15 mois soit jusqu’au 31 août 2013. Le salarié ayant repris le travail le 1er juillet 2013, il lui reste à cette date une période de 2 mois pour utiliser ces droits, commençant à courir lors de la communication par l’employeur de l’information requise.
  • pour la période de référence achevée au 31 mai 2013 : 24 jours de congés payés, reportables sur 15 mois soit jusqu’au 31 août 2014. Le salarié ayant repris le travail le 1er juillet 2013, il lui reste une période de 14 mois pour utiliser ces droits, commençant à courir lors de la communication par l’employeur de l’information requise.

L’employeur, s’il l’avait informé lors de sa reprise du travail le 1er juillet 2013, aurait indiqué au salarié qu’il disposait de 48 jours de congés payés à prendre. Si l’information n’a pas été donnée (ce qui paraît vraisemblable en l’état actuel du Code du travail), le délai de report est demeuré suspendu et le salarié disposera toujours de ses droits en 2024 lors de l’entrée en vigueur des nouveaux textes.

Si ce même salarié avait repris le travail plus de 3 mois après la fin de la dernière période de référence (31 août), il n’aurait pu cumuler que 24 jours de congés payés. Ainsi, s’il avait repris le travail le 2 septembre 2013, les congés payés acquis au titre de la période de référence achevée au 31 mai 2012 se seraient périmés au 31 août 2013. Il ne resterait donc plus à reporter à la date de reprise du travail que les droits acquis au titre de la période de référence achevée au 31 mai 2013, soit 24 jours.

Par ailleurs, peuvent également rester à reporter selon les situations, à la date de reprise du travail :

  • les congés payés antérieurs à l’arrêt de travail et non pris à cause de ce dernier,
  • ainsi que, le cas échéant, les droits à congés acquis entre le début de l’arrêt de travail et la fin de la première période de référence concernée par cet arrêt. En effet, à cette date le salarié ne sera pas arrêté depuis au moins un an, et le délai de report de 15 mois ne pourra donc pas débuter automatiquement sans information de l’employeur. Cette dernière ne pouvant, selon nous, intervenir que lors de la reprise du travail).

 

Le projet de texte est applicable rétroactivement

Le projet de texte prévoit une application rétroactive au 1er décembre 2009 pour les congés payés acquis durant un arrêt pour raison non professionnelle.

En revanche ne seraient pas concernés par la rétroactivité à 2009, les congés payés acquis durant un accident du travail ou une maladie professionnelle, pour lesquels le texte ne prévoit l’acquisition d’aucun droit supplémentaire. La question se pose néanmoins de savoir si ces salariés ne pourraient pas se prévaloir du droit européen pour demander à leur employeur de rétablir leurs droits à 2 jours par mois depuis 2009 (sous réserve de la limitation résultant du délai de report de 15 mois).

Concernant les congés payés acquis durant un arrêt pour raison non professionnelle par des salariés ayant quitté l’entreprise, la question se pose encore de savoir si la demande du salarié pourrait porter uniquement sur les arrêts remontant aux trois années précédant la rupture du contrat ou bien si elle pourrait remonter jusqu’en 2009 dans la mesure où l’employeur n’ayant pas informé les salariés de leurs droits, la prescription pourrait être considérée comme n’ayant pas commencé à courir.

 

Un délai spécifique de forclusion s’appliquerait aux salariés toujours présents dans l’entreprise

En ce qui concerne les salariés toujours présents dans l’entreprise, le projet de texte met en place un délai de forclusion de deux années pour faire valoir leurs droits à congés payés résultant des nouvelles dispositions législatives. Ce délai débuterait à la date d’entrée en vigueur de ces dispositions (Projet de loi art. 32 bis, II). Il ressort de l’avis du Conseil d’État que ce délai serait applicable même en l’absence de démarche d’information de l’employeur.

En revanche, le projet de texte n’aborde pas spécifiquement la question des règles de prescription applicable aux salariés ayant quitté l’entreprise. Le Conseil d’État estime cependant dans son avis que, dans le cas où le salarié aurait quitté l’entreprise, la prescription triennale prévue à l’article L 3245-1 du Code du travail serait susceptible d’être soulevée, faisant obstacle aux actions, en cours ou à venir, engagées par des salariés ayant quitté leur employeur plus de trois ans avant de saisir le juge.

 

D’un point de vue comptable, dans l’attente de l’adoption définitive de cette nouvelle législation française. C’est le droit de l’UE qui s’applique à la clôture 2023…

D’un point de vue comptable, ce qui a été jugé par la Cour de cassation en septembre dernier a conduit à révéler une obligation légale issue de l’application du droit européen existant à la clôture 2023, à la fois pour les arrêts de travail enregistrés depuis septembre et pour les arrêts passés et ceux qui étaient en cours en septembre.

Une question se posait néanmoins jusqu’à présent sur l’étendue de cette obligation et notamment sur sa potentielle rétroactivité au 1er décembre 2009, date d’entrée en vigueur du traité de Lisbonne ayant donné force contraignante à la Charte des droits fondamentaux de l’UE. Le projet de loi du Gouvernement apporte des précisions qui répondent en partie à cette question.

 

… tel que précisé par le projet de loi jusqu’à la date d’arrêté des comptes

Bien qu’il ne soit pas encore définitivement adopté, il ressort de l’avis du Conseil d’Etat que le projet s’inscrit parfaitement dans les prescriptions du droit européen en vigueur depuis 2009 et devant être mis en œuvre par les entreprises. En conséquence, à notre avis, il devrait être considéré comme un événement post-clôture lié à des conditions existante à la date de clôture dans la mesure où il ne fait que préciser les obligations des entreprises à cette date issues du droit européen. À ce titre, il devrait en être tenu compte pour ajuster les provisions constatées à la clôture 2023.

En résumé, les entreprises doivent :

1. Pour les arrêts de travail enregistrés depuis septembre et ceux en cours à cette date, faire désormais en sorte que les salariés continuent d’acquérir des droits à congés payés sur toute la période d’arrêt conformément au projet de texte ; il faut en conséquence créditer les congés au compteur des salariés concernés au titre de cette obligation et ajuster les dettes provisionnées pour congés payés (compte 4282).

les dettes provisionnées pour congés payés, correspondant aux congés crédités au compteur du salarié, sont déductibles fiscalement, sauf pour les entreprises ayant opté avant 1987 pour le maintien du régime fiscal alors en vigueur, soit leur déduction au titre de l’exercice de leur paiement.

2. Pour les arrêts de travail pour raison non professionnelle passés enregistrés depuis 2009, appliquer ce nouveau dispositif de façon rétroactive, en respectant les règles de report précisées plus haut et en tenant compte des règles de prescription et de forclusion, c’est-à-dire :

  • pour les salariés présents dans l’effectif, en recensant les arrêts depuis 2009,
  • pour les salariés ayant quitté l’entreprise depuis moins de 3 ans, en recensant a minima les arrêts des 3 années précédents la rupture du contrat de travail, voire les arrêts depuis 2009 (en précisant laquelle de ces deux hypothèses a été retenue).

Pour les salariés ayant quitté l’entreprise depuis plus de 3 ans, en revanche, aucun passif ne devrait être à constater.

En pratique, si l’entreprise a décidé avant la clôture de créditer des congés au compteur des salariés encore présents, elle doit ajuster la provision pour congés payés (compte 4282).

Si elle a pris avant la clôture un engagement formel de verser une compensation financière à son personnel au titre des congés payés non octroyés, une dette est à comptabiliser à ce titre. Le passif relève alors de la catégorie des provisions pour charges de personnel, déductibles fiscalement (BOI-BIC-PROV-30-20-10 no 1).

En l’absence d’engagement, pris avant la clôture, de créditer le compte du salarié ou de lui verser une compensation financière, la sortie de ressources liée au risque de réclamation des salariés concernés doit être estimée selon les hypothèses raisonnables attachées aux arrêts de travail concernés à la date d’arrêté des comptes (salariés présents ou ayant quitté l’entreprise, nombre de salariés concernés, durée et ancienneté des arrêts, contexte social, contentieux en cours…).

Si la sortie de ressources est probable ou certaine à la date d’arrêté des comptes, elle doit être provisionnée (compte 1511). Il n’est pas possible, à notre avis, de considérer que l’obligation ne peut être évaluée avec une fiabilité suffisante. Cette exception, prévue par le PCG (art. 322-4), n’est pas applicable à ce cas où une analyse est toujours possible, sur la base d’hypothèses à indiquer en annexe.

Si la sortie de ressources n’est pas jugée suffisamment probable, il s’agit d’un passif éventuel (PCG art. 321). Sauf si la probabilité de sortie de ressources est jugée faible, une information est à donner en annexe ce titre (nature du passif éventuel, estimation des effets financiers, indication des incertitudes relatives au montant ou à l’échéance de toute sortie de ressources ; PCG art. 833-12/2).

le régime de la provision est à notre avis celui des provisions pour litiges : en l’absence de demande d’indemnisation formalisée contre l’entreprise à la clôture, la provision n’est en principe pas déductible fiscalement (CE 7-8-2008 n°287712), sauf à envisager au cas par cas et, en fonction des circonstances, à se placer sous une jurisprudence plus souple. Le Conseil d’État a en effet jugé que la probabilité d’un risque de charges salariales supplémentaires pouvait résulter, pour une caisse de banques mutualistes, d’actions judiciaires engagées par des salariés d’autres caisses, dès lors que ces actions se fondaient sur un accord salarial applicable à l’ensemble des caisses (CE 24-5-2000 n°185647).

 

Sources : © Editions Francis Lefebvre 2024 – Retrouvez d’autres d’actualités sur le blog de l’Atwo Conseil !

Assemblées générales 2024 : toutes les nouveautés pour leur préparation

Assemblées générales 2024 : toutes les nouveautés pour leur préparation

Assemblées générales 2024 : toutes les nouveautés pour leur préparation

Ce dossier pratique présente les principales nouveautés pour la préparation des assemblées générales de 2024 des sociétés cotées et non cotées.

 

1 – Quelles nouveautés pour les rapports à présenter à l’assemblée générale ordinaire annuelle ?

La DPEF incluse dans le rapport de gestion 2024 (au titre de l’exercice 2023)

Sociétés cotées sur un marché réglementé et réglementation Taxonomie : les dernières évolutions

1. Les sociétés non financières (sociétés industrielles et commerciales), soumises à l’obligation de fournir dans leur rapport de gestion une déclaration non financière en application de la directive NFRD (« Non Financial Reporting Directive »), devront en 2024 (sur l’exercice 2023) présenter dans leur déclaration de performance extra-financière (DPEF) davantage d’informations au titre de la réglementation Taxonomie, à savoir :

  • leurs indicateurs d’éligibilité et d’alignement à la réglementation Taxonomie (chiffre d’affaires, CapEx c’est-à-dire les dépenses d’investissement, et OpEx c’est-à-dire les dépenses d’exploitation) sur les deux objectifs climatiques : adaptation au changement climatique et atténuation du changement climatique. Des données comparatives devront être fournies sauf pour les nouvelles activités ajoutées par l’amendement de juin 2023 de l’acte délégué « Climat » ;
  • ainsi que leurs indicateurs d’éligibilité (CA, CapEx, OpEx) sur les quatre autres objectifs environnementaux :
    • utilisation durable et protection des ressources aquatiques et marines,
    • transition vers une économie circulaire,
    • prévention et réduction de la pollution,
    • protection et restauration de la biodiversité et des écosystèmes.

Pour rappel, le reporting taxonomie est d’application progressive :

  • Pour la première année d’application en 2022 (sur l’exercice 2021), le reporting taxonomie était un reporting simplifié : seuls les indicateurs d’éligibilité sur les deux objectifs climatiques (CA, CapEx, OpEx) étaient à fournir ;
  • Pour sa deuxième année d’application en 2023 (sur l’exercice 2022), les sociétés concernées devaient fournir les indicateurs d’éligibilité et d’alignement uniquement sur les deux objectifs climatiques (CA, CapEx, OpEx).
  • Pour la mise en œuvre de ce reporting, les entreprises pourront utilement se référer aux bonnes pratiques identifiées par l’AMF dans son second rapport sur le reporting taxonomie (novembre 2023).

A noter : À compter du 1er janvier 2025, les informations relatives à la réglementation Taxonomie seront à insérer dans la section Environnement du rapport de durabilité créé par la CSRD (« Corporate Sustainability Reporting Directive ») qui viendra remplacer la DPEF.

Notons que le périmètre des sociétés soumises à la réglementation Taxonomie est appelé à s’élargir pour s’appliquer progressivement aux nouvelles entités qui seront soumises à la CSRD.
Pour rappel sont soumises actuellement à la réglementation Taxonomie, les entités d’intérêt public (sociétés cotées sur un marché réglementé, établissements de crédit, entreprises d’assurance…) appartenant à la catégorie des grandes entreprises, c’est-à-dire dépassant les seuils suivants (Règl. Taxonomie 2020/852 et dir. 2013/34/UE art. 19 bis et art. 3) :
– bilan > 20 M€ ;
– ou chiffre d’affaires > 40 M€ ;
et nombre de salariés > 500.

 

Sociétés cotées sur un marché réglementé : de nouvelles recommandations de l’ESMA sur le contenu de la DPEF

2. À l’instar des années précédentes, l’AMF encourage les sociétés dont les titres sont cotés sur un marché réglementé à appliquer les recommandations formulées par l’ESMA pour l’établissement de leur DPEF 2023 (Communiqués AMF du 8-11-2023 et ESMA du 25-10-2023 « Priorités européennes communes en matière d’application de la réglementation relative aux rapports financiers 2023 »). Ces recommandations s’articulent autour des trois principales priorités suivantes :

  • informations à fournir en lien avec l’article 8 du règlement Taxonomie. L’ESMA rappelle notamment que les nouveaux modèles de tableaux de reporting doivent être utilisés de manière fidèle et que des informations contextuelles doivent accompagner les indicateurs ;
  • transparence accrue dans la communication faite par les émetteurs, concernant les enjeux liés à la publication d’objectifs relatifs au climat : selon l’ESMA, il est important que les émetteurs communiquent des objectifs climatiques assortis d’échéances et qu’ils veillent au lien entre la stratégie globale de l’entreprise et les actions plus spécifiques mises en place pour atteindre notamment des objectifs de réduction des émissions des GES et leur financement ;
  • émissions de gaz à effet de serre (GES) sur le scope 3 (chaîne de valeur). L’ESMA rappelle certains aspects importants en termes de transparence : appréciation du caractère complet du reporting des émissions de GES en cas d’absence du scope 3, périmètre et méthodologie de calcul des émissions de scope 3, présentation des données brutes d’émissions de GES séparément des émissions séquestrées ou compensées, le cas échéant.

 

Modification du contenu du plan de vigilance à fournir dans le rapport de gestion

3. Depuis le 1er janvier 2024, les sociétés soumises à l’obligation de publier dans leur rapport de gestion un plan de vigilance et qui produisent ou commercialisent des produits issus de l’exploitation agricole ou forestière devront indiquer dans leur plan les mesures de vigilance raisonnable propres à identifier les risques et à prévenir la déforestation associée à la production et au transport vers la France de biens et de services importés (C. com. art. L 225-102-4 modifié par loi 2021-1104 art. 273).

Pour rappel sont soumises à l’obligation d’établir un plan de vigilance, les SA et SCA employant, à la clôture de deux exercices consécutifs (C. com. art. L 225-102-4) :

  • au moins 5 000 salariés en leur sein et dans leurs filiales françaises directes ou indirectes ;
  • ou au moins 10 000 salariés en leur sein et dans leurs filiales françaises et étrangères directes ou indirectes.

 

2 – Quelles nouveautés pour la préparation des assemblées ?

Demandes d’inscription de points à l’ordre du jour d’une assemblée générale : les précisions apportées par l’Ansa

4. Pour rappel, un ou plusieurs actionnaires représentant au moins 5 % du capital ont la faculté de requérir l’inscription à l’ordre du jour de l’assemblée de points ou de projets de résolution (C. com. art. L 225-105). La demande d’inscription d’un point à l’ordre du jour doit notamment être motivée, et le président du conseil d’administration ou le directoire doit en accuser réception (C. com. art. R 225-71).

Selon l’Association nationale des sociétés par actions (Ansa), les points ne peuvent en aucun cas donner lieu à un vote lorsqu’ils ne sont pas accompagnés d’un projet de résolution (Comité juridique n°11-012).

En outre, un point peut être inscrit à l’ordre du jour même s’il n’entre pas stricto sensu dans le champ de la compétence décisionnelle de l’assemblée convoquée (Comité juridique précité). En revanche, l’Ansa considère que le conseil d’administration doit écarter les demandes d’inscription à l’ordre du jour de points lorsqu’ils se rapportent notamment à des sujets fantaisistes ou étrangers à l’objet social ou encore présentant un caractère vexatoire ou diffamatoire (Comité juridique n°21-003). Pour l’AMF, il suffit que ce point puisse être rattaché à l’objet social ou au contenu des documents transmis à l’assemblée (Proposition n°1.4 B de la recommandation de l’AMF du 12-7-2012, DOC-2012-05).

L’Ansa a apporté des précisions sur la portée de l’article L 225-105 du Code de commerce et a répondu aux deux questions suivantes (Comité juridique n°23-024 du 3-5-2023) :

  • une société peut-elle refuser l’inscription d’un projet de résolution à l’ordre du jour de l’assemblée (ou d’une assemblée future) alors qu’elle a accepté l’inscription d’un point à l’ordre du jour sur ce même sujet ?
  • si un point a été inscrit à l’ordre du jour préalablement à l’AG (sans projet de résolution), pourrait-on admettre un projet de résolution déposé en séance au regard de ce point figurant à l’ordre du jour, et qui relèverait de la compétence de l’AG ?

À la première question, l’Ansa a répondu qu’une société pouvait refuser l’inscription d’un projet de résolution à l’ordre du jour alors même qu’elle a accepté l’inscription d’un point à l’ordre du jour sur le même sujet. En effet, selon l’Ansa :

  • le conseil devrait inscrire à l’ordre du jour les « points », même ceux relevant de la gestion, s’ils ne sont pas accompagnés d’un projet de résolution décisionnaire. Il s’agit alors d’un débat sans vote ;
  • en revanche, le conseil est fondé à rejeter un projet de résolution décisionnaire en matière de gestion ;
  • le fait que l’ordre du jour comporte un point en dehors de la compétence de l’AG qui n’est pas assorti d’un projet de résolution est sans incidence sur le droit pour d’autres personnes de demander d’inscrire sur le même sujet un tel projet (à condition qu’il n’implique pas une décision relevant notamment de la gestion réservée au conseil d’administration).

À la seconde question, l’Ansa a répondu par la négative : il n’est pas possible d’admettre un projet de résolution déposé en séance au regard d’un point figurant à l’ordre du jour. En effet, l’Ansa rappelle que la loi impose un calendrier précis en matière de demande d’inscription des projets de résolutions par les actionnaires préalablement à l’AG. Dès lors, et sauf les cas limités de résolutions pouvant être votées directement en séance, il n’est pas possible en application des dispositions du Code de commerce fixant un délai préalable pour l’envoi des demandes de résolutions nouvelles, de présenter inopinément en séance de telles résolutions, même si l’ordre du jour contenait un « point » qui n’était pas complété d’un projet de résolution.

Pour rappel, les résolutions nouvelles pouvant être votées directement en séance relèvent uniquement des catégories suivantes (Comité juridique n°2946.6 et Vade-mecum à l’attention des membres du bureau des AG p. 9 et 10) :

  • amendements à des projets de résolutions régulièrement inscrits ;
  • révocations des administrateurs (et leur remplacement) ;
  • décisions qui sont nécessaires à la réalisation des résolutions régulièrement adoptées et dont elles forment le complément indispensable.

 

3 – Quelles nouveautés pour les résolutions à prévoir en assemblée générale ?

Décisions à prendre en assemblée générale ordinaire

Nomination d’un CAC ou d’un OTI en charge de vérifier le rapport de durabilité dès 2024 pour les premières sociétés concernées

5. Pour rappel, les sociétés cotées sur un marché réglementé (ainsi que les établissements de crédit et les entreprises d’assurance) ayant un bilan supérieur à 25 M€ ou un chiffre d’affaires supérieur à 50 M€ et plus de 500 salariés (seuils à considérer au niveau consolidé, le cas échéant) devront publier leur premier rapport de durabilité en 2025 qui portera sur l’exercice 2024 (C. com. art. L 232-6-3 et L 233-28-4 ; Ord. 2023-1142 art. 33). Ce rapport devra faire l’objet d’une certification obligatoire qui pourra être réalisée (C. com. art. L 822-1 nouveau) :

  • soit par le ou les CAC ;
  • soit par un CAC ;
  • ou soit par des auditeurs des informations de durabilité exerçant au sein d’organismes tiers indépendants (OTI), par exemple les avocats ou les experts-comptables, sous certaines conditions.

Les personnes et entités astreintes à publier des informations de durabilité consolidées en application de l’article L 233-28-4 du Code de commerce peuvent désigner (C. com. art. L 821-41 nouveau créé par ord. 2023-1142 du 6-12-2023) :

  • plusieurs CAC ;
  • ou un CAC et un OTI ;
  • ou plusieurs OTI.

Les grandes entreprises cotées devront ainsi proposer la nomination d’un CAC ou d’un OTI à l’assemblée générale ordinaire des actionnaires qui se réunira en 2024.

Le comité d’audit (ou un comité spécialisé distinct) sera chargé d’émettre une recommandation sur le ou les commissaires aux comptes (ou organisme tiers indépendant) proposés à la désignation par l’assemblée générale.

A noter : L’absence de nomination d’un CAC ou d’un OTI chargé de la certification du rapport de durabilité est sanctionnée pénalement par une amende de 30 000 € et une peine d’emprisonnement de 2 ans à l’encontre du dirigeant (C. com. art. L 821-6 et L 822-40).

Le CAC, s’il est différent du CAC chargé de la certification des comptes, ou l’OTI, devra être convoqué à toute assemblée générale. Le non-respect de cette disposition est sanctionné des mêmes peines que celles indiquées pour l’absence de nomination d’un CAC ou d’un OTI pour la vérification des informations de durabilité (C. com. art. L 821-6 et L 822-40).

Par ailleurs, le fait pour le dirigeant d’une personne morale de faire obstacle aux vérifications du CAC ou de l’OTI est sanctionné d’une amende de 75 000 € et d’une peine d’emprisonnement de 5 ans (C. com. art. L 821-6 et L 822-40).

Vote ex ante des rémunérations des dirigeants : prise en compte des recommandations du Code Afep-Medef

6. Pour rappel, le Code Afep-Medef a été modifié en décembre 2022 pour intégrer à la rémunération des dirigeants mandataires sociaux plusieurs critères liés à la responsabilité sociale et environnementale, dont au moins un critère en lien avec les objectifs climatiques de l’entreprise. Ces critères, définis de manière précise, doivent refléter les enjeux sociaux et environnementaux les plus importants pour l’entreprise. Les critères quantifiables doivent être privilégiés.

La politique de rémunération modifiée pour prendre en compte ces nouvelles recommandations et présentée dans le rapport sur le gouvernement d’entreprise de la société cotée devra ainsi être soumise au vote de l’AGO (vote dit « ex ante » dans le cadre de la procédure de « Say on pay » applicable aux sociétés dont les actions sont cotées sur un marché réglementé ; C. com. art. L 22-10-34).

Le Haut Comité du gouvernement d’entreprise (HCGE) relève dans son rapport de novembre 2023 qu’à ce jour l’ensemble des sociétés du SBF 120 ont intégré un ou plusieurs critères RSE dans la rémunération variable annuelle de leurs dirigeants mandataires sociaux exécutifs (à l’exception d’une société qui a rejoint nouvellement l’indice). 87,3 % des sociétés du SBF 120 intègrent un critère climatique dans la rémunération de leurs dirigeants (annuelle ou à long terme). Ce chiffre s’élève à 98,14 % pour les sociétés du CAC 40.

Vote ex post des rémunérations des dirigeants : conséquences de la radiation de la cote

7. L’Ansa s’est récemment prononcée sur les conséquences sur le vote ex post de la radiation de la cote d’une société (CJ du 4-10-2023 n° 23-039).

En l’espèce, une société dont les actions étaient cotées sur un marché réglementé et qui clôturait son exercice au 31-12 a fait l’objet d’une radiation en février de l’année N. La question s’est posée de savoir si l’ordre du jour de la prochaine AGOA (assemblée générale ordinaire annuelle), qui se tiendra en juin N, devra comporter un vote dit « ex post » sur les rémunérations perçues par les dirigeants au cours de l’exercice clos N–1, la société ayant été cotée durant la totalité de cet exercice.

Pour rappel, les éléments fixes, variables et exceptionnels, composant la rémunération totale et les avantages de toute nature, versés ou attribués à chaque mandataire social au cours de l’exercice, font l’objet l’année suivante d’un vote individuel ex post dans les sociétés dont les actions sont cotées sur un marché réglementé. À défaut d’approbation lors de ce vote ex post, les éléments des rémunérations variables et exceptionnels ne peuvent pas être versés (C. com. art. L 22-10-34).

Dans sa réponse, l’Ansa a distingué deux cas et a considéré que lorsque la société a été radiée :

  • avant la réunion du conseil fixant l’ordre du jour de la prochaine AGOA, il est acquis que cet ordre du jour n’a pas à comporter de mentions réservées obligatoirement aux seules sociétés dont les actions sont cotées sur un marché réglementé. Il s’agit en effet d’une législation d’exception ne s’appliquant qu’à une catégorie définie de sociétés. Celles qui sont sorties de ce champ d’application n’y sont plus soumises ;
  • après cette réunion, mais avant l’AG, il est possible que cette assemblée en prenne acte et décide qu’il n’y a plus lieu de procéder au vote sur une telle résolution.

Présentation de la stratégie climatique à l’assemblée générale pour les sociétés cotées

8. Le Code Afep-Medef recommande que la stratégie climatique définie par le conseil d’administration ainsi que les principales actions engagées à cet effet soient présentées à l’AGO au moins tous les trois ans ou en cas de modification significative de la stratégie (Code précité art. 5.4 modifié en décembre 2022). Ces nouvelles recommandations sont applicables aux assemblées générales qui se tiennent en 2024 statuant sur les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2023 (les sociétés étaient toutefois invitées à les appliquer dès l’exercice 2022).

Selon le HCGE, à l’issue des assemblées générales 2023, 85 sociétés ont présenté leur stratégie climatique, soit 81,7 % des sociétés du SBF 120 (dont 34 sociétés du CAC 40). 9 sociétés indiquent prévoir une telle présentation lors de leur assemblée générale 2024 statuant sur l’exercice 2023 (Rapport du HCGE, novembre 2023).

Notons que le Code Afep-Medef ne prévoit qu’une présentation de la stratégie climatique et non pas un vote (« Say on climate ») par les actionnaires des actions engagées par la société.

Le HCGE précise que les sociétés sont libres d’inscrire un point (sans vote) à l’ordre du jour de l’assemblée générale sur leur stratégie climatique, voire de soumettre une résolution climatique au vote consultatif de leurs actionnaires (Rapport précité). Pour rappel, le groupe de travail créé au sein du Haut Comité juridique de la place financière de Paris (HCJP) a rendu son rapport le 15 décembre 2022, dans lequel il conclut que la possibilité pour les actionnaires de voter en AGO sur la stratégie climatique de la société au moyen d’un vote consultatif (« Say on climate ») ne heurte aucune règle juridique et en particulier pas le principe de hiérarchie des organes sociaux. L’AMF relève pour sa part qu’il n’existe aucun consensus s’agissant de l’opportunité du « Say on climate » : les émetteurs, comme les actionnaires et investisseurs, restent divisés sur l’utilité et le bien-fondé d’une telle pratique, au demeurant très minoritaire et disparate dans sa mise en œuvre opérationnelle, et parfois accusée de « greenwashing ». En 2023, 10 sociétés avaient inscrit des projets de résolutions climatiques à l’ordre du jour de leur assemblée (Rapport 2023 sur le gouvernement d’entreprise et la rémunération des dirigeants du 14-12-2023).

Dans un communiqué en date du 8 mars 2023 concernant le dialogue actionnarial sur les questions environnementales et climatiques, l’AMF invite les sociétés cotées sur un marché réglementé à renforcer davantage leur communication sur leur stratégie climatique et à la présenter à chaque assemblée générale sous la forme d’un point à l’ordre du jour avec débat. La stratégie devrait être assortie de cibles précises et devrait être présentée de manière argumentée et détaillée. Un suivi en AG dans les mêmes conditions devrait être mis en place à intervalles réguliers. Enfin, l’AMF considère qu’il sera opportun, le moment venu et dans des conditions à définir par voie législative, que ces informations soient soumises à l’approbation des actionnaires comme c’est le cas pour les comptes annuels.

Distribution de réserves : vers une remise en cause de leur libre distribution en dehors de l’assemblée générale annuelle d’approbation des comptes ?

9. Pour rappel, dans un jugement du 23 septembre 2022, le tribunal de commerce de Paris a considéré que la décision de distribuer des réserves ne pouvait être prise qu’au cours de l’assemblée générale d’approbation des comptes et qu’une telle distribution décidée dans une autre assemblée générale devait être qualifiée de « dividendes fictifs ».

Ce jugement a été frappé d’appel et dans l’attente de la position qui sera prise par la cour d’appel, nous réitérons notre recommandation de limiter les distributions de réserves, primes ou report à nouveau au cadre de l’assemblée générale d’approbation des comptes.

Si une telle décision devait être néanmoins prise pour des besoins opérationnels hors de l’assemblée générale annuelle d’approbation des comptes, nous recommandons de baser la décision sur un arrêté comptable intermédiaire certifié par le CAC (sur une base volontaire) démontrant les capacités distributives de la société.

Décisions à prendre en assemblée extraordinaire

Attribution gratuite d’actions (AGA) : relèvement des plafonds

10. Afin de favoriser l’actionnariat salarié, la loi 2023-1107 du 29 novembre 2023 sur le partage de la valeur a relevé les plafonds du nombre total d’actions pouvant être attribuées gratuitement par les sociétés par actions (C. com. art. L 225-197-1 modifié) :

  • le plafond général global est porté à 15 % du capital social à la date de la décision d’attribution (contre 10 % antérieurement) ;
  • pour les sociétés non cotées sur un marché réglementé et répondant à la définition des PME, le plafond des AGA profitant uniquement à certaines catégories de personnel est porté à 20 % du capital social (contre 15 % antérieurement) ;

Ces seuils de 15 % et 20 % sont portés :

  • à 30 % du capital social lorsque l’AGA profite à des salariés représentant, d’une part, au moins 50 % de l’effectif salarié de la société et, d’autre part, au moins 25 % des salaires bruts tels qu’ils sont pris en compte pour l’assiette des cotisations de sécurité sociale et versés lors du dernier exercice social ;
  • à 40 % du capital social lorsque les AGA bénéficient à l’ensemble des salariés de la société.

Ces nouveaux plafonds pourront donc être pris en compte par l’AGE de la société (ou la collectivité des associés pour les SAS) pour fixer le pourcentage maximal du capital qui pourra être gratuitement attribué.

La loi 2023-1107 du 29 novembre 2023 sur le partage de la valeur prévoit deux autres mesures permettant d’assouplir les conditions d’attribution gratuite d’actions :

  • nouvelles règles du calcul du plafond individuel ;
  • élargissement des possibilités d’attribution aux mandataires sociaux de sociétés appartenant à un groupe.

Les décisions collectives de SAS peuvent-elles être adoptées par une minorité, c’est-à-dire à seuil inférieur à celui de la majorité des voix ou des actions ?

11. C’est en ce sens que se prononce la cour d’appel de Paris dans un arrêt du 4 avril 2023 (CA Paris 4-4-2023 n°2205320), estimant que dans les SAS les décisions peuvent être adoptées aux conditions prévues par les statuts et à un seuil inférieur à celui de la majorité des voix ou des actions. Cette solution se justifierait par le principe de liberté contractuelle ou statutaire qu’on trouve dans les SAS. En effet, dans les SAS, le principe de proportionnalité du droit de vote aux actions détenues ne s’applique pas, de sorte que l’on pourrait prévoir qu’une décision peut être adoptée par un associé ou une partie des associés représentant une fraction du capital social inférieure à la majorité simple. Rappelons que la Cour de cassation s’était prononcée en sens contraire dans un arrêt du 19 janvier 2022 (Cass. com. 19-1-2022 n°19-12.696). À la suite de la résistance de la cour d’appel de Paris, l’assemblée plénière de la Cour de cassation devra trancher.

 

4 – Quelles nouveautés pour la tenue des assemblées générales (ordinaires et extraordinaires) ?

Retrait en cours d’assemblée d’une résolution inscrite à l’ordre du jour : selon l’AMF, la régularité de ce retrait sans vote d’un « amendement de retrait » pose question

12. L’AMF s’est penchée dans son dernier rapport sur le gouvernement d’entreprise (Rapport 2023 du 14-12-2023) sur la pratique consistant pour un actionnaire à retirer, en début de séance, un projet de résolution de l’ordre du jour, constatant qu’un nombre trop important d’actionnaires étaient réticents à l’adoption de la résolution concernée.

L’AMF observe qu’une telle pratique porte atteinte :

  • – au principe de fixité de l’ordre du jour ;
  • – ainsi qu’à la bonne information des actionnaires, lesquels peuvent avoir pris en compte le contenu de l’ordre du jour dans leurs décisions d’investissement ou dans leurs intentions ou décisions de vote (éventuellement déjà exprimées, dans le cadre d’un vote à distance préalable à l’assemblée ou d’un vote par procuration) en se fondant sur l’économie générale des résolutions proposées.

L’AMF relève par ailleurs que :

  • la doctrine considère généralement qu’un tel retrait est irrégulier, même si certains auteurs estiment toutefois qu’un retrait de résolution en séance est possible si les actionnaires adoptent un « amendement de retrait » ;
  • des associations professionnelles ont indiqué qu’un tel retrait est possible dès lors que le conseil d’administration y est favorable (Vade-mecum Afep-Ansa à l’attention des membres du bureau des assemblées générales, mis à jour en novembre 2015 : Communication Ansa n°15-046 p. 17 s.).

A noter : L’Ansa a récemment confirmé cette position (Comité juridique n°24-001 du 10-1-2024). Elle considère que les résolutions inscrites à la demande d’un ou plusieurs actionnaires peuvent être retirées par ces derniers à tout moment avant le vote. Elle précise toutefois que, bien qu’il n’y ait pas d’obligation formelle, toute décision de retrait devrait être motivée. Le président de l’assemblée informera l’assemblée de la décision de retrait et de ses motifs. Pour les sociétés cotées, la question se posera au cas par cas de savoir si la décision de retrait (qu’elle ait lieu avant ou pendant l’AG) doit être rendue publique par l’émetteur dès qu’il en a connaissance.

Eu égard aux éléments ci-avant mentionnés, l’AMF considère que la régularité du retrait en séance d’un projet de résolution sans vote d’un « amendement de retrait » pose question et qu’une clarification, le cas échéant par voie législative, mériterait d’être apportée pour plus de sécurité juridique.

Les statuts de SAS ne peuvent pas écarter un associé du vote sur une convention réglementée

13. Selon l’Ansa, les statuts d’une SAS ne peuvent pas écarter un associé du vote sur une convention réglementée à laquelle il est intéressé (Comité juridique n°23-022 du 5-4-2023). En effet, l’Ansa rappelle que tout associé a le droit de participer aux décisions collectives (C. civ. art. 1844) et considère que les statuts ne peuvent pas priver un associé de son droit de vote en dehors des cas prévus par la loi.

L’Ansa précise néanmoins que rien n’interdit de prévoir dans les statuts des mécanismes permettant de moduler les droits de vote lors de cette décision, par exemple en accordant un droit de vote plural aux associés non concernés par la convention ou, au contraire, une réduction des voix de l’intéressé. En effet, les statuts de SAS peuvent prévoir les conditions dans lesquelles les décisions collectives des associés sont adoptées.

Les statuts pourront également instituer un organe chargé d’approuver les conventions avant leur conclusion, en écartant la personne intéressée de la décision. Seules seront alors soumises au vote des associés les conventions préalablement approuvées par cet organe.

Les décisions collectives de SAS prises en violation des statuts peuvent être annulées

14. Dans un arrêt du 15 mars 2023, la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence en considérant désormais que l’article L 227-9, al. 4 du Code de commerce permet à tout intéressé de demander l’annulation des décisions d’une SAS prises en violation des clauses statutaires qui définissent un domaine de compétence des associés complémentaire à celui fixé par la loi et les modalités particulières d’adoption des décisions collectives concernées. La Cour de cassation précise que la décision de la SAS pourra être annulée uniquement si la violation est de nature à influer sur le résultat de la consultation.

A noter : Cette nouvelle position de la Cour de cassation n’aboutit pas à sanctionner par la nullité toute décision de SAS prise en violation des statuts. Sont concernées par la nullité :

  • Celles qui ne respectent pas la compétence réservée par les statuts à la collectivité des associés (en application de C. com. art. L 227-9, al. 1) ;
  • Ainsi que les décisions collectives prises par les associés sans respecter les formes et conditions de leur adoption que les statuts ont déterminées (consultation écrite, réunion d’une assemblée physique, participation par visioconférence, vote à distance, règles de quorum et de majorité, formalités de convocation, etc.).

 

La participation d’un non-associé aux décisions collectives d’une SARL constitue une cause de nullité des assemblées

15. Dans un arrêt du 11 octobre 2023, la Cour de cassation a jugé que la participation d’un non-associé aux décisions collectives d’une SARL constitue une cause de nullité des assemblées au cours desquelles ces décisions ont été prises dès lors que l’irrégularité est de nature à influer sur le résultat du processus de décision.

 

5 – Quelles nouveautés post-assemblées ?

Nullité des délibérations pour défaut de nomination d’un CAC : les précisions apportées par la Cour de cassation

16. Dans un arrêt en date du 21 juin 2023, la Cour de cassation a apporté deux précisions importantes concernant les conséquences du défaut de désignation d’un CAC sur la validité des délibérations de l’AGO :

Pour rappel, l’article L 820-3-1 du Code de commerce (devenu l’article L 821-5 avec ord. 2023-1142 du 6-12-2023) dispose que les délibérations de l’AGO des sociétés prises à défaut de désignation régulière d’un CAC sont nulles.

  • la nullité des délibérations de l’AGO en cas de défaut de désignation régulière d’un CAC ne peut jouer qu’en l’absence de désignation d’un CAC titulaire. Elle ne joue donc pas en l’absence de désignation ou de désignation irrégulière du CAC suppléant ;
  • la nullité s’applique à toutes les délibérations des AGO et pas uniquement à celles pour lesquelles l’intervention d’un CAC est imposée par la loi.

A noter : Ces précisions apportées par la Cour de cassation valent pour toutes les formes de sociétés commerciales tenues de désigner un CAC, que ce soit en vertu de la loi ou par décision des associés.

 

6 – Perspectives 2024-2025

Davantage de petites entreprises pourront être exemptées de rapport de gestion

17. À la suite du relèvement des seuils européens définissant les différentes catégories d’entreprises pour prendre en compte les effets de l’inflation (Dir. 2013/34/UE art. 3 modifiée par directive déléguée 2023/2775 du 17-10-2023), le décret 2024-152 du 28 février 2024 a rehaussé en droit français les seuils définissant les petites entreprises. Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2024, les petites entreprises en dessous de deux des trois seuils suivants pourront être dispensées d’établir un rapport de gestion (C. com. art. L 232-1 renvoyant à L 230-1 ; D 230-1 modifié par décret précité) :

  • bilan : 7,5 M€ (contre 6 M€ actuellement) ;
  • chiffre d’affaires : 15 M€ (contre 12 M€ actuellement) ;
  • nombre de salariés : 50 (pas de changement).

Le relèvement des seuils permettra également d’élargir le nombre d’entreprises pouvant bénéficier de simplifications comptables prévues pour les PME non cotées sur un marché réglementé (présentation et publication des comptes annuels, établissement de comptes consolidés…).

Un nouveau rapport de durabilité à fournir dans le rapport de gestion à la place de la DPEF

18. Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2024, les grandes entités d’intérêt public (EIP telles que les sociétés cotées sur un marché réglementé) avec plus de 500 salariés devront insérer dans leur rapport de gestion un nouveau rapport de durabilité en remplacement de la DPEF.

A noter : Pour les autres grandes sociétés qui seront soumises à l’obligation d’établir un rapport de durabilité en 2026 sur l’exercice 2025, une dernière DPEF devra être produite sur l’exercice 2024 (Ord. 2023-1142 du 6-12-2023 art. 33).

 

Réorganisation des contenus du rapport de gestion, du rapport sur le gouvernement d’entreprise et du rapport financier annuel

19. Outre l’obligation d’établissement du nouveau rapport de durabilité, l’ordonnance de transposition de la CSRD 2023-1142 du 6 décembre 2023 a également réorganisé les informations à fournir dans différents rapports : rapport de gestion, rapport sur le gouvernement d’entreprise, rapport financier annuel. Les modifications introduites sont applicables à compter du 1er janvier 2025.

Modification du contenu du rapport de gestion

20. L’ordonnance de transposition de la CSRD du 6 décembre 2023 introduit plusieurs modifications quant au contenu du rapport de gestion, et notamment :

  • – les SAS devront fournir dans leur rapport de gestion les mêmes informations que celles prévues pour les SA (C. com. art. L 232-1 modifié par ord. précitée) ;
  • – de nouvelles informations sur les ressources incorporelles essentielles seront à fournir par les grandes sociétés commerciales ainsi que les PME cotées sur un marché réglementé (C. com. art. L 232-1 et L 22-10-35 modifiés par l’ord. précitée) ;
  • – les informations relatives aux installations classées « Seveso seuil haut » sont étendues aux SAS, SARL et SNC (C. com. art. L 232-1-1 nouveau) ;
  • – les informations relatives aux principales caractéristiques des procédures de contrôle interne et de gestion des risques sont transférées du rapport de gestion vers le rapport sur le gouvernement d’entreprise (C. com. art. L 22-10-35 modifié).

Modification du contenu du rapport sur le gouvernement d’entreprise

21. Outre le transfert des informations relatives aux principales caractéristiques de contrôle interne et de gestion des risques dans le rapport sur le gouvernement d’entreprise, l’ordonnance du 6 décembre 2023 modifie les informations à fournir sur la politique de diversité appliquée aux membres du conseil d’administration (C. com. art. L 22-10-10 modifié).

Modification du contenu du rapport financier annuel (RFA)

22. L’ordonnance du 6 décembre 2023 prévoit de modifier le contenu du RFA qui devra contenir en plus des informations et documents actuellement prévus (C. mon. fin. art. L 451-1-2 modifié) :

  • – l’ensemble des informations prévues par le Code de commerce pour le rapport de gestion ;
  • – et le rapport sur le gouvernement d’entreprise (il est actuellement inséré de manière facultative dans le RFA).

 

Rapport relatif à l’impôt sur les bénéfices (CbCR public)

23. Une obligation de déclaration publique des informations relatives à l’impôt sur les bénéfices, pays par pays (CbCR public), est instaurée pour les exercices ouverts à compter du 22 juin 2024 (Dir. UE 2021/2101 du 24-11-2021, JOUE 2021/L 429/1).

Sont notamment concernées les sociétés autonomes dont le chiffre d’affaires net excède 750 M€ à la clôture de deux exercices consécutifs et les entités mères ultimes de groupes consolidés établies en France lorsque le chiffre d’affaires consolidé excède ces mêmes limites (C. com. art. L 232-6, I et III créé par ord. 2023-483 du 21-6-2023 et D 232-8-1 créé par décret 2023-493 du 22-6-2023).

Les informations qui doivent figurer dans le rapport sur l’impôt sur les bénéfices portent notamment sur (C. com. art. L 232-6, II créé par ord. 2023-483 du 21-6-2023 et D 232-8-1 créé par décret 2023-493 du 22-6-2023) :

  • la description de la nature des activités ;
  • le nombre de salariés ;
  • le chiffre d’affaires net ;
  • le montant du bénéfice ou des pertes avant impôt sur les bénéfices ;
  • le montant de l’impôt sur les bénéfices dû et acquitté, et les bénéfices non distribués.

Elles sont présentées séparément pour chaque État membre de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’EEE.

Le rapport est déposé au greffe du tribunal de commerce dans un délai de douze mois à compter de la clôture de l’exercice et mis à disposition du public pendant au moins cinq années consécutives sur le site internet de la société (C. com. art. R 232-23, I créé par décret 2023-493 du 22-6-2023).

 

Sources : © Editions Francis Lefebvre 2024 – Retrouvez d’autres d’actualités sur le blog de l’Atwo Conseil !