Embauche d’un salarié : nouveau décret sur les informations à fournir

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Embauche d’un salarié : nouveau décret sur les informations à fournir

Un décret du 30 octobre 2023 énumère les différentes informations que doit fournir l’employeur au moment de l’embauche. Il contient également des dispositions propres aux travailleurs envoyés à l’étranger.

La loi portant diverses dispositions d’adaptation du droit français au droit de l’Union européenne (Loi 2023-171 du 9-3-2023) impose à l’employeur de fournir au salarié nouvellement embauché des informations plus détaillées qu’auparavant. Elle a ainsi transposé la directive 2019/1152 du 20 juin 2019 relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l’Union européenne.

Cependant, cette obligation d’information ne pouvait être remplie, concrètement, qu’à compter de la parution du décret d’application de cette loi. C’est chose faite avec le décret du 30 octobre 2023 qui précise notamment les principales informations relatives à la relation de travail que doit délivrer l’employeur au salarié, tant celles dues à tout salarié que celles dues aux salariés appelés à travailler à l’étranger, ainsi que les modalités d’établissement et de délivrance de celles-ci.

Le texte reprend en grande partie le contenu des informations qui étaient énumérées dans la directive de 2019.

Des informations dues à tous les salariés à l’embauche

La liste des informations à communiquer est fixée…

L’employeur doit remettre au salarié un ou plusieurs documents écrits contenant les informations principales relatives à la relation de travail (C. trav. art. L 1221-5-1).

Le décret indique que ces documents comportent au moins les informations suivantes (C. trav. art. R 1221-34 réécrit) :

  • Identité des parties à la relation de travail ;
  • Lieu(x) de travail et, si elle est distincte, adresse de l’employeur ;
  • Intitulé du poste, fonctions, catégorie socioprofessionnelle ou catégorie d’emploi ;
  • Date d’embauche ;
  • Pour un CDD, date de fin ou durée prévue de la relation de travail ;
  • Pour un salarié temporaire, identité de l’entreprise utilisatrice, lorsqu’elle est connue et aussitôt qu’elle l’est ;
  • Le cas échéant, durée et conditions de la période d’essai ;
  • Droit à la formation assuré par l’employeur (C. trav. art. L 6321-1) ;
  • Durée du congé payé auquel le salarié a droit ou modalités de calcul de cette durée ;
  • Procédure à observer par l’employeur et le salarié en cas de cessation de leur relation de travail ;
  • Éléments constitutifs de la rémunération mentionnés à l’article L 3221-3 du Code du travail, indiqués séparément, y compris les majorations pour heures supplémentaires, et périodicité et modalités de paiement de cette rémunération ;
  • Durée de travail quotidienne, hebdomadaire, mensuelle ou ses modalités d’aménagement sur une autre période de référence (lorsqu’il est fait application des dispositions des articles L 3121-41 à L 3121-47 du Code du travail), conditions de réalisation d’heures supplémentaires ou complémentaires, et, le cas échéant, toute modalité concernant les changements d’équipe en cas d’organisation du travail en équipes successives alternantes ;
  • Conventions et accords collectifs applicables au salarié dans l’entreprise ou l’établissement ;
  • Régimes obligatoires auxquels est affilié le salarié, mention des contrats de protection sociale complémentaire dont les salariés bénéficient collectivement en application d’un accord collectif ou d’une décision unilatérale de l’employeur ainsi que, le cas échéant, les conditions d’ancienneté qui y sont attachées.

A noter : 1) S’agissant des informations concernant le salarié en CDD ou temporaire, elles font double emploi, selon nous, avec les mentions devant figurer dans le contrat à durée déterminée ou le contrat de mission, qui doit être remis au salarié dans les 2 jours ouvrables suivant l’embauche ou la mise à disposition. Le CDD doit en effet mentionner la date du terme s’il comporte un terme précis ou bien sa durée minimale s’il est sans terme précis (C. trav. art. L 1242-12). Quant au contrat de mission, il comporte la reproduction des clauses et mentions du contrat de mise à disposition (C. trav. art. L 1251-16). De ce fait, l’identité de l’entreprise utilisatrice, partie au contrat de mise à disposition, apparait nécessairement.

2) À défaut d’autres modalités prévues par accord de branche, l’information sur le droit conventionnel applicable dans l’entreprise ou l’établissement était délivrée, jusqu’au 31 octobre 2023, via une notice remise au salarié lors de son embauche. Cette notice est supprimée (C. trav. art. R 2262-1, al. 1 modifié).

 

… la forme et les délais de communication également

La communication des informations relatives à la période d’essai, à la formation, aux congés payés, à la procédure de cessation du contrat, à la rémunération, à la durée du travail et aux régimes de protection sociale applicables peut prendre la forme d’un renvoi aux dispositions législatives et réglementaires ou aux stipulations conventionnelles applicables (C. trav. art. R 1221-35, al. 1 réécrit). S’agissant des autres informations, l’employeur pourra s’appuyer sur des modèles de documents que le ministère du travail a prévu de mettre à sa disposition (voir ci-dessous)

Les informations relatives à l’identité des parties, aux lieux de travail, au poste, à la date d’embauche, à la date de fin ou à la durée du CDD, à la période d’essai, à la rémunération et à la durée du travail doivent être communiquées individuellement au salarié au plus tard le 7ème jour calendaire à compter de la date d’embauche. Les autres informations visées ci-dessus sont communiquées au plus tard un mois à compter de la même date (C. trav. art. R 1221-35, al. 2 réécrit). S’agissant du délai dont dispose l’employeur pour répondre à une demande de communication de ces informations formulée par un salarié recruté avant le 1er novembre 2023, voir ci-dessous.

Tableau récapitulatif

Le tableau ci-après récapitule les informations à délivrer au salarié et les modalités d’information.

Éléments d’information Renvoi possible aux dispositions législatives, réglementaires, conventionnelles Informations à communiquer dans les 7 jours calendaires suivant l’embauche Informations à communiquer dans le délai de 1 mois suivant l’embauche
Identité des parties à la relation de travail   X  
Lieu(x) de travail et, si elle est distincte, adresse de l’employeur   X  
Poste, fonctions, catégorie socioprofessionnelle ou catégorie d’emploi   X  
Date d’embauche   X  
Le cas échéant, durée et conditions de la période d’essai X X  
Droit à la formation X   X
Durée du congé payé ou modalités de calcul de cette durée X   X
Procédure en cas de cessation de la relation de travail X   X
Informations sur la rémunération X X  
Informations sur la durée du travail X X  
Conventions et accords collectifs applicables dans l’entreprise ou l’établissement     X
Protection sociale X   X

 

Des informations complémentaires pour les salariés envoyés à l’étranger

Lorsqu’un salarié exerçant habituellement son activité professionnelle en France est appelé à travailler à l’étranger pour une durée supérieure à 4 semaines consécutives, les documents d’information doivent comporter, outre les informations visées ci-dessus, les informations suivantes (C. trav. art. R 1221-36, I nouveau) :

  • Le ou les pays dans lesquels le travail à l’étranger est effectué et la durée prévue ;
  • La devise servant au paiement de la rémunération ;
  • Le cas échéant, les avantages en espèces et en nature liés aux tâches concernées ;
  • Des renseignements indiquant si le rapatriement est organisé et, s’il l’est, les conditions de rapatriement du salarié.

A noter : En application de l’article R 1221-34 du Code du travail dans sa rédaction antérieure au décret du 30 octobre 2023, ces informations devaient déjà être communiquées au salarié expatrié pour une durée supérieure à un mois dont le contrat de travail était soumis à la législation française. Dans le silence du nouveau décret sur ce point, on peut à notre avis considérer que les informations visées ci-dessus doivent être communiquées au salarié envoyé à l’étranger dont le contrat de travail est soumis à la législation française ou à celle d’un autre État membre ayant transposé l’article 7 de la directive 2019/1152 du 20 juin 2019 précitée (qui liste les informations supplémentaires à communiquer aux salariés envoyés à l’étranger).

L’obligation d’informer le salarié expatrié au sens de la sécurité sociale de sa situation au regard de la protection sociale pendant la durée de son expatriation – et en particulier de sa possibilité d’adhérer au régime d’assurance volontaire de la Caisse des Français de l’étranger (CFE) puisqu’il n’est plus couvert par le régime français de sécurité sociale – devrait continuer à s’imposer à l’employeur, quelle que soit la durée d’expatriation. En effet, même si cette obligation n’est pas formellement reprise dans le décret du 30 octobre 2023 (seule est imposée l’information des salariés sur les régimes obligatoires de protection sociale complémentaire auxquels ils sont affiliés), elle a pour fondement l’obligation générale d’exécution de bonne foi du contrat de travail.

Lorsqu’il relève du champ d’application de la directive 96/71/CE du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services, le salarié appelé à travailler dans un autre État membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen est, en outre, informé (C. trav. art. R 1221-36, II nouveau) :

  • De la rémunération à laquelle il a droit en vertu du droit applicable de l’État d’accueil ;
  • Le cas échéant, des allocations propres au détachement et des modalités de remboursement des dépenses de voyage, de logement et de nourriture ;
  • De l’adresse du site internet national mis en place par l’État d’accueil conformément aux dispositions de l’article 5 § 2 de la directive 2014/67/UE du 15 mai 2014 relative à l’exécution de la directive 96/71/CE.

A noter : Il revient en effet à chaque État membre de publier sur un site internet national officiel unique les informations détaillées sur les conditions de travail et d’emploi applicables aux travailleurs détachés sur leur territoire.

La communication des informations relatives à la devise et à la rémunération que le travailleur détaché doit percevoir dans le cadre d’une prestation de services peut prendre la forme d’un renvoi aux dispositions législatives, réglementaires ou aux stipulations conventionnelles applicables (C. trav. art. R 1221-37, al. 1 nouveau). S’agissant des autres informations, l’employeur pourra s’appuyer sur des modèles de documents que le ministère du travail a prévu de mettre à sa disposition (voir ci-dessous).

L’ensemble des informations précitées relatives à la relation de travail (informations générales à transmettre à l’embauche et informations spécifiques au travail hors de France) doivent être communiquées au salarié appelé à travailler à l’étranger avant son départ (C. trav. art. R 1221-37, al. 2 nouveau). S’agissant du cas où le salarié était déjà à l’étranger au 1er novembre 2023, voir ci-dessous. Le décret précise que ce délai s’applique sans préjudice des délais de 7 jours ou d’un mois visés ci-dessus. À notre avis, selon la situation, l’employeur pourrait avoir à respecter chacun de ces délais ou avoir à transmettre toutes les informations avant le départ à l’étranger.

 Exemple —————————————————————————————————————

Pour un salarié embauché le 1-12-2023 et envoyé à l’étranger le 1-2-2024, l’employeur doit transmettre les informations liées à l’embauche au plus tard dans les délais de 7 jours et 1 mois (selon les informations concernées) suivant l’embauche, puis les informations liées au détachement au plus tard le 31-1-2023.

Pour un salarié embauché le 1-12-2023 et partant à l’étranger le 4-12-2023, l’employeur doit transmettre l’ensemble des informations avant le 4-12-2023.

Pour un salarié embauché en 2020 (soit avant l’entrée en vigueur du décret) n’ayant pas demandé les informations essentielles à la relation de travail et partant à l’étranger le 4-12-2023, on conseillera à l’employeur de transmettre l’ensemble des informations avant le 4-12-2023.

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Une communication sous format papier ou électronique

L’employeur doit adresser les informations ci-dessus dans les délais requis sous format papier, par tout moyen conférant date certaine, ou sous format électronique, sous réserve que le salarié dispose d’un moyen d’accéder à une information sous format électronique, que les informations puissent être enregistrées et imprimées et que l’employeur conserve un justificatif de la transmission ou de la réception de ces informations (C. trav. art. R 1221-39 nouveau).
Un arrêté du ministère du travail fixera des modèles de documents visant à faciliter la mise en œuvre de l’obligation d’information (C. trav. art. R 1221-38 nouveau).

Une nouvelle communication en cas de modification des informations en cours de contrat

Si les informations ci-dessus évoluent au cours de la relation de travail, l’employeur doit en informer le salarié au travers d’un document, et ce, dans les plus brefs délais et au plus tard à la date de prise d’effet de la modification en cause, sous format papier ou électronique dans les conditions visées ci-dessus (C. trav. art. R 1221-40, al. 1 nouveau).

Par exception, cette obligation d’information ne s’applique pas lorsque la modification des informations résulte exclusivement d’un changement des dispositions législatives et réglementaires ou des stipulations conventionnelles en vigueur (C. trav. art. R 1221-40, al. 2 nouveau).

Et si l’employeur n’informe pas le salarié ?

Il est prévu que le salarié n’ayant pas reçu les informations requises peut saisir le conseil de prud’hommes afin de les obtenir, mais seulement après avoir mis en demeure son employeur de lui communiquer les documents requis ou, le cas échéant, de compléter les documents remis (C. trav. art. L 1221-5-1, al. 2). Le décret du 30 octobre 2023 complète ces dispositions en indiquant que la saisine du conseil de prud’hommes par le salarié n’ayant pas reçu les informations requises dans les délais prévus n’est possible qu’en l’absence de réponse à la mise en demeure dans un délai de 7 jours calendaires à compter de la réception de celle-ci par l’employeur (C. trav. art. R 1221-41 nouveau).

A noter : Ni l’article L 1221-5-1 ni le décret du 30 octobre 2023 ne prévoient l’obligation pour le salarié de mettre en demeure son employeur avant de saisir le conseil de prud’hommes en cas de non-transmission par l’employeur du document l’informant des modifications des informations initialement transmises. Il s’agit à notre sens d’un oubli.

Entrée en vigueur et application aux salariés recrutés ou envoyés à l’étranger avant le 1er novembre 2023

Les dispositions du décret du 30 octobre 2023 sont entrées en vigueur le 1er novembre 2023 (Décret art. 7, II-al. 1). Elles s’appliquent donc aux contrats de travail conclus à compter de cette date ainsi qu’aux salariés envoyés à l’étranger à compter de cette date.

Par exception, le salarié recruté avant le 1er novembre 2023 qui n’a pas été destinataire d’une ou de plusieurs des informations mentionnées ci-dessus peut en demander communication à tout moment auprès de son employeur, qui est tenu d’y répondre, selon l’information demandée, dans le délai de 7 jours calendaires ou d’un mois (Décret art. 7, II-al. 2).

De même, lorsqu’une ou plusieurs informations n’ont pas été communiquées à un salarié envoyé à l’étranger avant le 1er novembre 2023, l’intéressé peut en demander communication à tout moment auprès de son employeur, qui est tenu d’y répondre dans un délai de 7 jours.

 

Sources : © Editions Francis Lefebvre 2023 – Retrouvez d’autres d’actualités sur le blog de l’Atwo Conseil !