Loi de Financement de sécurité sociale pour 2024 : Synthèse des principales mesures
La Loi de Financement de sécurité sociale pour 2024 a été publiée au Journal Officiel le 27 décembre 2023 après avoir fait l’objet de deux recours devant le Conseil constitutionnel.
De nombreuses mesures impactent directement la gestion des dossiers en matière sociale : paie, contrôles sociaux, travailleurs indépendants, arrêts maladie. Cette note a pour objectif de vous présenter une synthèse des principales mesures.
1 – Travailleurs indépendants
La première modification concerne l’alignement des assiettes des cotisations sociales et de la CSG-CRDS. Les cotisations sociales seront donc calculées sur la base de l’assiette de la CSG-CRDS sous déduction des sommes perçues au titre de l’épargne salariale (intéressement, participation, abondements à un plan d’épargne ou plan d’épargne retraite). Seront réintégrés les revenus de remplacement versés par la sécurité sociale ou dans le cadre d’un « contrat Madelin », sauf en cas d’une affection de longue durée.
Entrée en vigueur au 1er janvier 2025 et 1er janvier 2026 pour le régime agricole
Assiette de la CSG-CRDS (art. 18) | |
BIC* | Montant, hors plus-values et moins-values de long terme, des produits tirés de ces mêmes activités, diminué du montant des charges |
BNC* | Montant, hors plus-values et moins-values de long terme, des recettes perçues ou acquises diminué du montant des dépenses de l’année |
Entreprises soumises à l’IS | – Rémunération du mandat – Part des dividendes excédant 10 % du capital social |
Micro-entrepreneur | Bénéfices du micro-BIC ou micro-BNC, sauf option pour les cotisations minimales |
*En cas d’exercice en société, ces montants sont retenus en proportion des droits aux bénéfices dans la société dont disposent ces travailleurs indépendants à hauteur des rémunérations et des avantages personnels non déductibles des résultats de la société qu’ils ont perçus
Ces assiettes font l’objet d’un abattement de 26 % qui ne saurait être ni inférieur à un plancher (au maximum égal à la cotisation minimale annuelle d’assurance retraite de base, soit 11,5 % du PASS) supérieur à un plafond (au moins égal au PASS). Ces valeurs seront déterminées par décret.
Entrée en vigueur au 1er janvier 2025 et 1er janvier 2026 pour le régime agricole
-> Travail via les plateformes numériques (art. 6)
En vue de lutter contre la sous-déclaration de l’activité réalisée par les micro-entrepreneurs passant par des plateformes numériques il est prévu de rendre obligatoires, pour les opérateurs des plateformes numériques, la déclaration sur le Chiffres d’affaires ou les recettes générées sur lesdites plateformes, ainsi que le précompte des cotisations sociales et taxes afférentes.
Afin de faciliter la mise en œuvre de cette mesure, il est également prévu de renforcer les communications d’information entre les administrations fiscales et sociales dès le 1er janvier 2024, sous réserve de la publication d’un décret. Les manquements sont sanctionnés d’une pénalité financière pouvant aller jusqu’à 5 % du Chiffres d’affaires ou des recettes sur lesquels cette obligation a été méconnue.
Entrée en vigueur au 1er janvier 2026 pour certains opérateurs avant une généralisation du dispositif au 1er janvier 2027
-> Obligation de transmission des données d’identification
Cette mesure s’accompagne également d’une obligation pour les travailleurs indépendants de transmission de leur données d’identification à l’opérateur de plateforme qui les transmettra ensuite à l’Urssaf Caisse nationale. Les manquements sont sanctionnés d’une pénalité financière pouvant aller jusqu’à 5 % du Chiffres d’affaires ou des recettes sur lesquels cette obligation a été méconnue.
-> Auto-modulation des cotisations sociales
De plus, le dispositif expérimental permettant aux travailleurs indépendants d’opter pour le calcul de leur cotisations « en temps réel » sur la base de leur revenu mensuel ou trimestriel est prolongé jusqu’au 31 décembre 2027.
2 – Assurance maladie
-> Limitation de la durée des arrêts maladie délivrés par téléconsultation (art. 65)
La prescription ou le renouvellement d’un arrêt de travail ne peut désormais excéder 3 jours et la prolongation d’un arrêt de travail par téléconsultation ne peut pas avoir pour effet de porter sa durée à plus de 3 jours. Par exception, cette limitation ne s’applique pas dans les cas suivants :
- Lorsque l’arrêt de travail est prescrit ou renouvelé par le médecin traitant ou la sage-femme référente (le médecin téléconsultant est donc le médecin traitant ou la sagefemme référente) ;
- En cas d’impossibilité dûment justifiée par le paiement de consulter en présentiel un médecin pour prolonger un arrêt de travail déjà prescrit.
Entrée en vigueur au 1er janvier 2024
-> Indemnisation des interruptions médicales de grossesse (art. 64)
Pour améliorer la couverture des femmes ayant subi une interruption de grossesse pratiquée pour motif médical, il est instauré une indemnisation sans délai de carence, à l’instar du récent dispositif créé en faveur des femmes ayant subi une interruption spontanée de grossesse (fausse couche). Cette mesure s’applique aux salariées, aux artisanes, aux commerçantes et aux professionnelles libérales, sous réserve des conditions d’ouverture de droit.
Entrée en vigueur à compter d’une date prévue par décret, et au plus tard au 1er juillet 2024.
3 – Cotisations sociales
-> Clarification du régime social de l’indemnité de rupture conventionnelle (art. 23)
Pour les salariés en droit de bénéficier d’une pension de retraite, l’indemnité de rupture conventionnelle est exonérée de cotisations sociales dans la limite maximale de 2 fois le plafond annuel de sécurité sociale (PASS) et dans le respect des plafonds fiscaux, sans prise en compte du caractère imposable de l’indemnité. Pour rappel, l’exonération fiscale est accordée dans la limite du montant le plus élevé entre :
- 2 fois la rémunération annuelle brute perçue au cours de l’année civile précédant la rupture ou 50 % de l’indemnité si ce montant est supérieur, dans la limite de 6 PASS ;
- le montant de l’indemnité légale ou conventionnelle.
-> Réduction de cotisations patronales maladie et allocations familiales (art. 20)
En raison de la forte inflation et des évolutions du SMIC qu’elle a induites, il a été décidé de déconnecter la réduction de cotisations patronales maladie et allocations familiales du SMIC afin d’en réduire le coût pour l’État. Les réductions s’appliqueront aux rémunérations ne dépassant pas un certain montant fixé par décret, établi selon une nouvelle méthode de calcul du seuil plancher et dans la limite des plafonds actuels de 2,5 et 3,5 smic (dont la valeur sera immuable).
Jusqu’au 31 décembre 2023 | A compter du 1er janvier 2024 | |
Cotisation maladie | Réduction applicable jusqu’à 2,5 smic (valeur de l’année en cours) |
Réduction applicable jusqu’à un montant fixé par décret ne pouvant être inférieur à :
Dans la limite de 2,5 smic de l’année en cours |
Allocations familiales | Réduction applicable jusqu’à 3,5 smic (valeur de l’année en cours) |
Réduction applicable jusqu’à un montant fixé par décret ne pouvant être inférieur à :
Dans la limite de 3,5 smic de l’année en cours |
-> Transfert de certaines cotisations à l’Urssaf (art. 13)
Après de nombreux reports, le transfert à l’URSSAF des contributions versées au régime AGIRC-ARRCO est abandonné.
Par ailleurs, l’option offerte aux branches professionnelles de transférer le recouvrement des contributions conventionnelles de formation professionnelle et de dialogue social aux URSSAF avait été prévue à compter du 1er janvier 2024 puis, abandonnée par le Gouvernement avant d’être finalement réintroduite.
Il est prévu que les branches volontaires pourront, à compter de 2026, transférer l’Urssaf le recouvrement desdites contributions. En pratique, l’accord instituant les contributions conventionnelles de formation et de dialogue social pourra donner mandat à branche concernée en vue de signer une convention avec l’Urssaf Caisse Nationale organisant le transfert. Un modèle de convention sera fixée par arrêté ministériel.
Entrée en vigueur au 1er janvier 2026 sous réserve de la publication du décret d’application
-> Calcul de l’effectif des groupements d’employeurs (art. 21)
Afin de mettre fin aux contradictions de règles calcul entre le Code du travail et le Code de la sécurité sociale, les règles « sécurité sociale » sont alignées sur celles prévues par le Code du travail. Ainsi, sauf en ce qui concerne la tarification des risques d’accidents du travail et de maladies professionnelles, les règles suivantes s’appliquent :
- Les salariés mis à la disposition, en tout ou partie, d’un ou de plusieurs de ses membres par un groupement d’employeurs ne sont pas pris en compte dans l’effectif de ce groupement d’employeurs ;
- Les salariés mis à disposition par un groupement d’employeurs sont pris en compte par l’entreprise utilisatrice à due proportion de leur temps de travail, pour le calcul de ses effectifs.
Entrée en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 1er janvier 2026
4 – Obligations déclaratives et contrôles Urssaf
-> Déclarations sociales des entreprises étrangères (art. 13)
Les entreprises étrangères sans établissement en France mais occupant des salariés en France ne pourront plus désigner de représentant pour procéder à leurs déclarations sociales. Ces déclarations seront à effectuer auprès du guichet unique des entreprises.
Entrée en vigueur le 1er mars 2024
-> Procédure Urssaf en cas d’abus de droit (art. 5)
Le comité des abus de droits est supprimé. De ce fait, la procédure d’abus de droit est transformée. Elle devient une procédure de sanction administrative prononcée par le directeur de l’organisme de recouvrement sur proposition des agents de contrôle.
Le cotisant aura désormais la possibilité dans le cadre d’une procédure pour abus de droit de demander la prolongation de la période contradictoire pour répondre à la lettre d’observation et ainsi disposer de 60 jours contre 30.
En cas d’abus de droit, l’Urssaf applique une pénalité de 20 % du montant des cotisations et contributions sociales dues, dans des conditions et garanties qui seront précisées par décret en Conseil d’État.
Applicable aux procédures dont les lettres d’observation sont notifiées à compter du 1er janvier 2024 à l’exception de la pénalité nécessitant un décret d’application
-> Renforcement des sanctions relatives à la fraude sociale (art. 9)
Un délit de facilitation à la fraude sociale est créé. Ce délit est constitué par la mise à disposition, à titre gratuit ou onéreux, d’un ou de plusieurs moyens, services, actes ou instruments juridiques, comptables, financiers ou informatiques ayant pour but de permettre à un ou à plusieurs tiers de se soustraire frauduleusement à la déclaration et au paiement des cotisations et contributions sociales dues ou d’obtenir une allocation, une prestation, un paiement ou un avantage indus d’un organisme de protection sociale.
Ce délit est puni d’une peine de 3 ans d’emprisonnement et de 250 000 € d’amende, étant précisé que cette peine est portée à 5 ans d’emprisonnement et à 500 000 € d’amende lorsque l’infraction est commise en utilisant un service de communication au public en ligne ou lorsqu’elle est commise en bande organisée.
Outre le fait que d’inciter autrui à se soustraire à l’obligation d’affiliation à un organisme de sécurité sociale ou de payer les cotisations sociales, il est précisé que ce délit vise également l’incitation à se soustraire aux obligations déclaratives des cotisations, à l’obtention frauduleuse du versement de prestations, ou d’avantages servis par un organisme de protection sociale, ainsi que le refuser de se conformer aux prescriptions de la législation en matière de sécurité sociale.
Pour rappel ce délit est puni d’un emprisonnement de 2 ans et d’une amende de 30 000 €.
Sources : © Infodoc Experts 2024 – Retrouvez d’autres d’actualités sur le blog de l’Atwo Conseil !