Les députés ont entre les mains le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, dont l’examen va débuter en séance publique le 20 octobre. Consécration de nombreuses mesures annoncées dans le plan pour les travailleurs indépendants, prolongation du régime dérogatoire d’indemnisation des arrêts de travail Covid…, telles sont quelques-unes des dispositions phares du projet.
Après avoir été présenté en conseil des ministres le 7 octobre 2021, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le même jour. Il sera examiné par les députés en séance publique à partir du 20 octobre, le vote solennel du texte étant programmé le 26 octobre 2021. Le commentaire ci-dessous porte sur l’essentiel des dispositions de ce texte intéressant les employeurs, les travailleurs indépendants en activité et leurs conseils.
Épidémie de Covid-19
Le projet de loi comporte plusieurs mesures en lien avec la crise sanitaire, tant pour les employeurs que pour les travailleurs indépendants.
Arrêts de travail Covid : vers la prolongation des règles dérogatoires d’indemnisation en 2022
Projet art. 46 : Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 prévoit de prolonger, pour une nouvelle année , le dispositif dérogatoire d’indemnisation des arrêts de travail spécial Covid, mis en place dès 2020. Il s’agit, selon l’étude d’impact du projet de loi, « de prévenir au mieux toute évolution préoccupante de la situation sanitaire ».
Rappelons que, en vertu de ce dispositif dérogatoire, ont droit aux IJSS et, s’ils sont salariés, au complément légal de salaire de l’employeur, sans vérification des conditions habituelles d’ouverture de droit, sans application d’un délai de carence et sans prise en compte dans les durées maximales d’indemnisation, les assurés dans l’impossibilité de travailler , y compris à distance (donc de télétravailler) et se trouvant dans une des situations liées à l’épidémie de Covid-19 (cas contact à risque de contamination, testés positifs à la Covid-19, présentant les symptômes dans l’attente de la réalisation d’un test de dépistage, placés en quarantaine ou contraints de s’isoler à leur retour d’un pays à risque ou arrivant en outre-mer, etc.).
De telles dérogations ne peuvent pas en principe être prises pour une durée supérieure à un an, conformément aux dispositions de l’article L 16-10-1 du CSS et L 1226-1-1 du Code du travail. C’est pourquoi, compte tenu des incertitudes sur l’évolution de l’épidémie de Covid-19, l’article 46 du projet prévoit de maintenir applicables ces dispositions dérogatoires jusqu’à une date fixée par décret et au plus tard jusqu’au 31 décembre 2022. Si des adaptations de niveau législatif s’avéraient nécessaires, le Gouvernement serait en outre autorisé à prendre par ordonnance , jusqu’au 31 décembre 2022 au plus tard, toute mesure relevant du domaine de la loi visant à rétablir, adapter ou compléter les dérogations aux règles de prise en charge prévues par les articles L 16-10-1 du CSS et L 1226-1-1 du Code du travail, étant précisé que chaque ordonnance pourrait prévoir l’application rétroactive des dispositions qu’elle contient, dans la limite d’un mois avant la date de sa publication.
Travailleurs indépendants : la possibilité de bénéficier de plans d’apurement dérogatoires de nouveau étendue
Projet art. 13, IV : L’article 65, VI de la troisième loi de finances rectificative pour 2020 (Loi 2020-935 du 30-7-2020) a introduit la possibilité d’accorder des plans d’apurement dérogatoires aux travailleurs indépendants pour leurs cotisations et contributions sociales restant dues au 30 juin 2020 ainsi que leurs dettes constatées au 31 octobre 2020. Cette possibilité a ensuite été élargie aux dettes constatées au 30 septembre 2021 par l’article 9, VIII de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021.
L’article 13, IV du projet de loi étendrait cette possibilité d’un trimestre supplémentaire en permettant aux plans d’apurement dérogatoires d’inclure les dettes constatées au 31 décembre 2021.
Les droits aux IJ maladie/maternité des travailleurs indépendants seraient préservés en 2022
Projet art. 47, III et IV : Le projet de loi prévoit de neutraliser les effets de la crise sanitaire sur l’assiette de calcul des droits aux IJ maladie et maternité des travailleurs indépendants impactés par celle-ci.
En principe, pour bénéficier du règlement des prestations en espèces au titre de l’assurance maladie et maternité pendant une durée déterminée, les travailleurs indépendants doivent justifier d’une période minimale d’affiliation ainsi que du paiement d’un montant minimal de cotisations (CSS art. L 622-3, al. 1). Le revenu d’activité pris en compte pour le calcul de ces prestations est celui correspondant à l’assiette sur la base de laquelle l’assuré s’est effectivement acquitté de ses cotisations à la date de l’arrêt de travail (CSS art. L 622-3, al. 2).
Compte tenu de l’impact de la crise sanitaire sur de nombreux secteurs d’activité et au vu des modalités de calcul des indemnités journalières de sécurité sociale versées aux travailleurs indépendants, il est proposé de reconduire le mécanisme de neutralisation des revenus 2020 instauré en 2021 pour le calcul des IJ maladie et maternité 2022, dès lors que celui-ci leur est plus favorable.
Les revenus d’activité de 2020 seraient neutralisés pour le calcul des IJ
Projet art. 47, III : En principe, le montant des IJ des travailleurs indépendants est fonction de la moyenne des revenus pris en compte pour le calcul des cotisations d’assurance maladie des 3 années civiles précédant la date de constatation médicale de l’incapacité de travail.
Aussi, par dérogation à l’article L 622-3 du CSS, il est prévu que, pour le calcul des IJ maladie et maternité dues pour les arrêts de travail débutant à compter du 1er janvier 2022 et jusqu’au 31 décembre 2022, le revenu d’activité retenu pourrait ne pas tenir compte des revenus d’activité de l’année 2020, dans des conditions qui seraient fixées par décret.
Des dispositions adaptées seraient prévues pour les micro-entrepreneurs
Projet art. 47, IV : Pour les travailleurs indépendants relevant du régime micro-social, qui n’acquittent pas de cotisation minimale, si la moyenne des revenus des 3 dernières années est inférieure au seuil de contributivité fixé à 10 % du Pass, l’IJ maladie est nulle et l’IJ maternité est égale à 10 % de celle versée aux travailleurs indépendants « classiques » (CSS art. D 622-8 et D 623-3). Par dérogation à l’article L 622-3, alinéa 2, seraient pris en compte pour le calcul de l’ensemble de leurs prestations en espèces (maladie, maternité, invalidité-décès, assurance vieillesse de base et complémentaire) le chiffre d’affaires ou les recettes brutes des années 2020 et 2021.
A noter : Le texte ne précise pas la date d’entrée en vigueur de cette mesure. On peut supposer qu’elle s’appliquerait aux IJ versées au titre des arrêts de travail débutant à compter du 1er janvier 2022 et jusqu’au 31 décembre 2022, comme pour les autres travailleurs indépendants.
L’affiliation des professionnels de santé au titre de la campagne vaccinale serait sécurisée
Projet art. 3, I : L’article 3, I du projet de loi prévoit de sécuriser les règles relatives à l’affiliation et aux cotisations et contributions des personnes participant à la campagne vaccinale dans le cadre de la lutte contre l’épidémie de Covid-19 en centre de vaccination qui sont directement rémunérées pour cette activité par un organisme local d’assurance maladie et qui ne sont pas affiliées en tant que travailleurs indépendants au titre d’une autre activité. Ces dispositions s’appliqueraient aux rémunérations perçues depuis le 1er janvier 2021.
Le cumul emploi-retraite des soignants serait déplafonné jusqu’à fin 2021
Projet art. 3, II-A : Afin de pouvoir mobiliser l’ensemble des professionnels de santé pendant la crise épidémique, un assouplissement des règles du cumul emploi-retraite a été décidé en urgence . Depuis la première vague, les soignants retraités peuvent ainsi cumuler entièrement leur pension de retraite et les revenus liés à leur reprise ou poursuite d’activité, sans être tenus de respecter de délai de carence avant de reprendre leur ancien emploi. Cette souplesse a été consacrée dans la loi 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire dans des termes qui pouvaient donner lieu à des interrogations concernant son champ d’application et sa durée de mise en œuvre. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 devrait clarifier ces mesures dérogatoires et les prolonger jusqu’à la fin de l’année.
Le texte préciserait qu’il s’agit de dérogations aux plafonds et délais de carence définis notamment aux deuxième et troisième alinéas de l’article L 161-22 du CSS et aux premier et deuxième alinéas de l’article L 643-6 du même Code. Il ne fait donc plus de doute que la mesure concerne tant les reprises ou poursuites d’activités à titre salarié que celles exercées à titre indépendant .
Il ne serait plus exigé que l’activité reprise ou poursuivie soit exercée au sein d’un établissement de santé ou médico-social, pourvu qu’il s’agisse d’une activité de professionnel de santé au sens de la quatrième partie du Code de la santé publique. Selon le projet de loi, cette possibilité de cumul intégral s’appliquerait durant les mois d’octobre 2020 à décembre 2021 , ce qui permettrait notamment de sécuriser a posteriori certaines situations.
Travail indépendant
Le projet de loi comporte de nombreuses mesures relatives aux travailleurs indépendants dont la majorité traduit des engagements présentés le 16 septembre dernier dans le plan en faveur des travailleurs indépendants. Outre les dispositions présentées ci-dessous, les travailleurs indépendants bénéficieraient aussi de certaines mesures en lien avec la crise sanitaire comme indiqué plus haut.
Deux mesures pour réduire le décalage temporel entre revenu et cotisations
Le plan d’action en faveur des travailleurs indépendants précité présenté par le Gouvernement le 16 septembre 2021 prévoit deux mesures visant à réduire le décalage temporel entre revenu et cotisations. Ces mesures – ouverture à l’ensemble des travailleurs indépendants du dispositif expérimental de modulation des acomptes de cotisations en temps réel et suppression de la sanction en cas d’écart important entre le revenu estimé et le revenu définitif – sont reprises par l’article 13 du projet de loi.
Vers la généralisation du dispositif de modulation des acomptes de cotisations en temps réel
Projet art. 13, III : Depuis le 1er janvier 2019, un dispositif dérogatoire de recouvrement des cotisations et contributions sociales est expérimenté par les Urssaf d’Île-de-France et d’Occitanie auprès de travailleurs indépendants volontaires hors ceux relevant de l’assurance vieillesse des professions libérales ou du régime micro-social. Ce dispositif permet aux travailleurs indépendants participants de moduler leurs acomptes de cotisations au fil de l’eau en fonction de leur activité ou de leurs revenus mensuels ou trimestriels. Ses modalités ont été définies par le décret 2018-533 du 27 juin 2018.
Selon l’étude d’impact, le déploiement de ce dispositif et son bilan ont été entravés par la crise sanitaire qui a obligé les Urssaf à interrompre leur activité de recouvrement. Pour cette raison, le rapport intermédiaire sur le bilan de cette expérimentation n’a pas été établi et remis au Parlement en septembre 2020 comme prévu par l’article 19 de la loi 2019-1446 du 24 décembre 2019.
L’article 13 du projet de loi envisage de prolonger cette expérimentation et de l’ouvrir à l’ensemble des travailleurs indépendants du territoire national afin d’en permettre une évaluation précise et d’intégrer dans le droit commun le dispositif de modulation des acomptes en temps réel.
L’expérimentation du dispositif de modulation des acomptes de cotisations en temps réel serait ainsi prolongée pour 2 ans , soit jusqu’au 31 décembre 2023. Elle serait étendue à l’ensemble des travailleurs indépendants hors ceux relevant d’un dispositif simplifié de déclaration et paiement des cotisations sociales (micro-social ou médecins et étudiants remplaçants).
Toutefois, les travailleurs indépendants relevant de l’assurance vieillesse des professions libérales ne pourraient participer à cette expérimentation qu’à compter du 1er janvier 2023 .
La participation à l’expérimentation ne s’effectuerait plus sur proposition des Urssaf, mais à la demande des travailleurs indépendants éligibles. Le dispositif de modulation des acomptes de cotisations en temps réel ne concernerait pas les cotisations suivantes :
- cotisations d’assurance vieillesse de base, de retraite complémentaire et d’invalidité-décès des professionnels libéraux affiliés à une autre section professionnelle que la Cipav ;
- cotisations pour le financement des avantages supplémentaires vieillesse des PAMC ;
- cotisations de retraite complémentaire des avocats non-salariés.
A notre avis : L’article 10 du projet de loi prévoit de transférer aux Urssaf le recouvrement des cotisations d’assurance vieillesse de base, de retraite complémentaire et d’invalidité-décès dues par les professionnels libéraux affiliés à la Cipav (voir ci-dessous), ce qui explique que ces cotisations entreraient dans le champ d’application du dispositif.
La remise du rapport intermédiaire prévu par l’article 19 de la loi 2019-1446 du 24 décembre 2019 serait reportée au 30 septembre 2022. Ces dispositions entreraient en vigueur au 1er janvier 2022 sauf pour les professionnels libéraux relevant d’une des sections de la Cnav-PL pour lesquelles un report est prévu comme indiqué ci-dessus.
La sanction pour déclaration en cours d’année d’un revenu sous-estimé serait supprimée
Projet art. 13, II : Les travailleurs indépendants peuvent échapper au calcul de leurs cotisations provisionnelles sur la base de leurs revenus des années précédentes en déclarant une estimation de leur revenu de l’année en cours auprès de leur Urssaf. Ce revenu estimé sert alors de base de calcul à leurs cotisations provisionnelles (CSS art. L 131-6-2). Cette faculté est toutefois actuellement assortie d’une sanction destinée à éviter un écart trop important entre le revenu estimé et le revenu définitif du travailleur indépendant. Lorsque ce revenu est supérieur de plus d’un tiers au revenu estimé, le travailleur indépendant se voit, en principe, appliquer une majoration de retard , sauf si des éléments en sa possession justifient l’estimation faite initialement (CSS art. L 131-6-2, al. 4).
L’article 13 du projet de loi prévoit de supprimer cette majoration. Ainsi, un indépendant pourrait déterminer en temps réel son revenu estimé et ajuster ses cotisations au plus près de ses possibilités financières, sans crainte d’une pénalité en cas de mauvaise estimation. Cette mesure entrerait en vigueur au 1er janvier 2022 en l’absence de dispositions contraires dans le projet de loi.
Les cotisations des professions libérales relevant de la Cipav seraient recouvrées par les Urssaf
Projet art. 10, I-2°, I-3°, I-6° et III : Le recouvrement des cotisations d’assurance vieillesse de base, de retraite complémentaire et de retraite complémentaire dues par les professionnels libéraux relevant de la Cipav serait transféré aux Urssaf et, en outre-mer, aux CGSS.
Ces cotisations seraient recouvrées selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables aux cotisations et contributions sociales de sécurité sociale dues par les travailleurs indépendants. Cette mesure entrerait en vigueur au 1er janvier 2023, étant précisé que les Urssaf et les CGSS seraient compétentes pour le recouvrement non seulement des cotisations et contributions nées après cette date, mais aussi des cotisations et contributions nées avant celle-ci.
Les conditions de délivrance des attestations de vigilance seraient assouplies
Projet art. 13, I : L’article L 243-15 du CSS impose au donneur d’ordre, en cas de recours à un sous-traitant pour un contrat d’au moins 5 000 €, de vérifier que son cocontractant est à jour de ses obligations de déclaration et de paiement auprès des organismes de recouvrement, tant au début du contrat que tous les 6 mois jusqu’à la fin de celui-ci. Pour cela, le sous-traitant doit produire une attestation de vigilance qui lui est délivrée par les organismes précités dès lors qu’il s’est acquitté des cotisations et contributions sociales à leur date d’exigibilité.
Toutefois, les entrepreneurs ayant débuté depuis moins de 3 mois et qui n’ont pas été redevables de cotisations et contributions n’ont pas accès à l’attestation de vigilance. De même, pour les travailleurs indépendants, les cotisations et contributions sociales forfaitaires de début d’activité sont acquittées après un report d’exigibilité de 90 jours, ce qui entraîne une obtention tardive des attestations de vigilance.
Pour pallier ces inconvénients, l’article 13, I du projet de loi prévoit d’ouvrir la possibilité de disposer d’une attestation de vigilance dès la déclaration des revenus d’activité par les entrepreneurs en début d’activité, sans attendre l’exigibilité des cotisations et contributions, et de créer une attestation de vigilance provisoire pour les travailleurs indépendants, permettant de couvrir la période comprise entre le début d’activité et la date de la première échéance déclarative ou de paiement.
A noter : L’étude d’impact note que ces mesures devraient permettre aux travailleurs indépendants de répondre avec plus de facilité et de célérité aux appels d’offre, ce qui simplifierait la perception de revenus en début d’activité et aurait donc un impact favorable sur leurs cotisations sociales.
Vers une extension du régime de maintien de droit aux IJ maladie-maternité
Projet art. 47, I-1° et 2° : Le projet de loi propose d’améliorer l’accès aux IJ maladie-maternité des assurés en situation de maintien de droit qui reprennent une activité professionnelle indépendante.
Actuellement , le droit aux IJ maladie-maternité est maintenu pendant 12 mois à l’assuré (e) cessant de remplir les conditions d’activité normalement requises pour en bénéficier, à moins que l’intéressé(e) justifie, avant l’expiration de ce délai, de nouveau des conditions d’ouverture du droit aux mêmes prestations dans le régime général ou un autre (CSS art. L 161-8).
De même, les chômeurs indemnisés bénéficient du maintien des droits à ces prestations dont ils relevaient antérieurement et continuent à en bénéficier, pendant 3 mois, en cas de reprise d’une activité insuffisante à ouvrir de nouveaux droits (CSS art. L 311-5 et R 311-1).
Le projet de loi prévoit de compléter ces dispositions afin de permettre aux assurés concernés de bénéficier du maintien de leurs droits aux IJ maladie au titre de leur ancienne activité lorsqu’ils reprennent une activité professionnelle indépendante leur permettant théoriquement d’ouvrir de nouveaux droits mais que, en pratique, les modalités de calcul de ces prestations conduisent à une indemnité nulle. Une disposition analogue est envisagée s’agissant de l’assurance maternité . Ainsi pourraient également bénéficier du maintien de droit aux IJ maternité au titre de leur ancienne activité les assurées justifiant des conditions d’ouverture de droit à ces prestations au titre de leur nouvelle activité indépendante mais dont les modalités de calcul conduisent à un montant qui serait fixé par décret.
Ces dispositions s’appliqueraient à compter du 1er janvier 2022 (Projet art. 47, V).
Les IJ spécifiques des PAMC en cas de difficulté médicale liée à la grossesse seraient supprimées
Projet art. 47, I-4° : Les praticiennes et auxiliaires médicales conventionnées (PAMC) relèvent aujourd’hui d’un régime particulier en cas de difficulté médicale liée à la grossesse, en application des dispositions de l’article L 646-5 du CSS. Afin de tenir compte de la mise en place d’un régime d’IJ maladie propres aux professions libérales, il est prévu de supprimer, à compter du 1er janvier 2022, ce régime spécifique d’IJ. Les PAMC bénéficieraient ainsi des dispositions de droit commun applicables aux travailleuses indépendantes dans ces situations, globalement plus favorables.
Des IJ maladie seraient versées au titre d’une activité indépendante en cumul emploi-retraite
Projet art. 47, I-3° : Aujourd’hui, contrairement aux salariés (CSS art. L 323-2) et, depuis le 1er juillet 2021 aux professionnels libéraux (CSS art. L 643-6 et D 622-2), les assurés qui bénéficient déjà d’une pension de retraite au titre de leur ancienne activité indépendante ne peuvent pas percevoir d’IJ maladie au titre d’une activité indépendante en cumul emploi-retraite.
Le projet de loi prévoit de remédier à cette situation en leur octroyant les mêmes droits qu’aux salariés. Cette disposition s’appliquerait aux arrêts de travail débutant le 1er janvier 2022 (Projet art. 47, V).
Conjoints collaborateurs et collaborateurs libéraux
Le statut de conjoint collaborateur serait modernisé
Projet art. 14 : L’article 12 de la loi 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises a obligé le conjoint du chef d’une entreprise artisanale, commerciale ou libérale qui y exerce de manière régulière une activité professionnelle à opter pour l’un des 3 statuts suivants : salarié, associé ou conjoint collaborateur (C. com. art. L 121-4, I). Le projet de loi prévoit de simplifier et de moderniser ce dernier statut à compter du 1er janvier 2022 .
Le statut de conjoint collaborateur serait limité à 5 ans…
Afin d’acter le caractère transitoire du statut de conjoint collaborateur, de limiter l’éventuelle situation de dépendance économique du conjoint à l’égard du chef d’entreprise et de lui permettre de s’ouvrir davantage de droits sociaux au cours de sa vie professionnelle, une personne ne pourrait pas conserver le statut de conjoint collaborateur pendant une durée supérieure à 5 ans, en tenant compte de l’ensemble des périodes et des entreprises au titre desquelles elle aurait opté pour celui-ci. Au-delà de cette durée, le conjoint continuant à exercer une activité professionnelle de manière régulière dans l’entreprise devrait opter pour le statut de conjoint salarié ou de conjoint associé . À défaut , il serait réputé avoir opté pour le statut de conjoint salarié.
Parallèlement, un nouvel article L 661-2, inséré dans le CSS, prévoirait que l’organisme de sécurité sociale dont relève le conjoint collaborateur pourrait procéder à sa radiation en cas de dépassement de la durée de 5 ans au delà de laquelle il est réputé exercer son activité sous le statut de conjoint salarié. La radiation serait décidée à l’issue d’une procédure contradictoire dont les modalités seraient précisées par décret en Conseil d’État et prendrait effet au terme de la dernière année civile au cours de laquelle la période de 5 ans arriverait à échéance. Un décret en Conseil d’État devrait déterminer les conditions d’application de cet article.
Ces dispositions entreraient en vigueur le 1er janvier 2022, mais il est prévu que, pour les personnes exerçant d’ores et déjà au 1er janvier 2022 une activité professionnelle sous le statut de conjoint collaborateur , la durée de 5 ans s’apprécierait au regard des seules périodes postérieures à cette date.
… et ouvert au concubin du chef d’entreprise artisanale, commerciale ou libérale
Actuellement , l’obligation de choisir un statut et la possibilité d’opter pour le statut de conjoint collaborateur ne concernent que le conjoint marié au chef de l’entreprise familiale ou la personne qui lui est liée par un pacte civil de solidarité. Afin de mieux répondre aux enjeux d’égalité économique et professionnelle, ces dispositions seraient étendues à la personne vivant en concubinage avec le chef d’une entreprise artisanale, commerciale ou libérale.
Conjoint collaborateur du micro-entrepreneur : le calcul des cotisations serait simplifié
Actuellement , les cotisations des conjoints collaborateurs des travailleurs indépendants relevant du régime micro-social sont calculées en appliquant le taux forfaitaire de cotisations applicable au micro-entrepreneur à une assiette égale à 46 % (pour les professionnels libéraux) ou 58 % (pour les autres travailleurs indépendants) de l’un ou l’autre des deux montants suivants, à la demande de l’assuré (CSS art. L 662-1 et D 613-5) :
- soit le chiffre d’affaires ou de recettes du travailleur indépendant ;
- soit le rapport entre un revenu forfaitaire égal au tiers du plafond annuel de la sécurité sociale et le taux d’abattement correspondant à l’activité exercée.
Le projet de loi prévoit une simplification du mode de calcul des cotisations sociales des conjoints collaborateurs des micro-entrepreneurs. Ainsi, leurs cotisations seraient calculées, à leur demande, soit sur la base d’un montant forfaitaire qui pourrait être fixé par décret, soit sur la base du chiffre d’affaires ou des recettes du chef d’entreprise. Le taux global de cotisation visé à l’article L 613-7, I du CSS pour les micro-entrepreneurs serait déterminé, pour les conjoints collaborateurs, à raison des seuls risques auxquels ils cotisent (retraites de base et complémentaire, invalidité-décès et IJ maladie ou maternité).
A noter : Les modalités de calcul des cotisations des autres conjoints collaborateurs devraient également être simplifiées. Selon le plan en faveur des travailleurs indépendants, présenté le 16 septembre 2021 par le chef de l’État, deux des cinq assiettes de calcul des cotisations de ces conjoints devraient être supprimées pour ne conserver que les options les plus protectrices des droits du couple. D’après le dossier de presse du plan précité, cette mesure devrait être inscrite dans un décret.
Congé d’adoption : la durée d’indemnisation du conjoint collaborateur serait celle de l’indépendant
Projet art. 47, I-5o et V : Deux dispositions coexistent actuellement , s’agissant de la durée d’indemnisation des conjoints collaborateurs qui adoptent ou accueillent un enfant. D’un côté, l’article D 663-1 du CSS, issu du décret 2019-529 du 27 mai 2019 (JO 29) prévoit que leur est applicable la durée d’indemnisation prévue à l’article L 623-1, III du même Code pour les travailleurs indépendants. Selon celui-ci, les parents adoptifs ou accueillants bénéficient d’IJ du même montant que celles mentionnées en cas de maternité pour la ou les périodes d’interruption se situant après l’arrivée de l’enfant au foyer, la durée maximale d’attribution de la prestation étant égale aux trois quarts de celle qui est prévue pour les IJ forfaitaires en cas de maternité. D’un autre côté, l’alinéa 4 de l’article L 663-1 du CSS, issu de l’ordonnance 2018-470 du 12 juin 2018 (JO 13) prévoit que la durée maximale d’attribution des indemnités complémentaires de remplacement est égale, pour les conjoints qui adoptent ou accueillent un enfant, à la moitié de celle prévue en cas de maternité.
Le projet de loi mettrait fin à la coexistence de ces deux dispositions, en supprimant l’alinéa 4 de l’article L 663-1 du CSS afin d’aligner la durée d’indemnisation des conjoints collaborateurs qui adoptent ou accueillent un enfant sur celle applicable aux travailleurs indépendants à compter du 1er janvier 2022.
Collaborateur libéral : la durée des congés de paternité et d’adoption serait allongée
Projet art. 47, II et V : L’article 73 de la loi 2020-1233 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021 a porté, à compter du 1er juillet 2021 :
- la durée du congé de paternité et d’accueil de l’enfant des salariés de 11 jours à 25 jours calendaires (18 à 32 jours calendaires en cas de naissances multiples) ;
- la durée de leur congé d’adoption de 10 semaines à 16 semaines pour les 2 premiers enfants arrivant au foyer.
Le projet de loi prévoit de rendre applicables ces nouvelles durées aux collaborateurs libéraux, en modifiant l’article 18, III bis de la loi 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises. Ces dispositions s’appliqueraient aux enfants nés ou adoptés à compter du 1er janvier 2022 ainsi qu’aux enfants, nés avant cette date, dont la naissance était supposée intervenir à compter de cette date.
Agriculture
IJ maladie : le délai de carence des exploitants agricoles serait aligné sur le régime général
Projet art. 48, I-3° et III : Actuellement, l’IJ maladie est attribuée aux non-salariés agricoles à l’expiration d’un délai de carence, calculé à compter de la constatation médicale de l’incapacité de travail, de 3 jours en cas d’hospitalisation et de 7 jours en cas de maladie ou d’accident de la vie privée (C. rur. art. D 732-2-2). Ce délai, qui était calqué sur celui applicable aux travailleurs indépendants en 2014 lors de la mise en place des IJ maladie des exploitants agricoles, n’est plus justifié (Étude d’impact p. 386). Rappelons en effet que le décret 2020-621 du 22 mai 2020 a aligné le délai de carence applicable aux travailleurs indépendants pour l’attribution des IJ maladie sur celui en vigueur dans le régime général. Depuis le 25 mai 2020, le délai de carence est donc de 3 jours, quelles que soient la durée et la nature de l’arrêt de travail pour les indépendants comme pour les salariés (CSS art. L 323-1 et R 323-1).
Poursuivant dans la voie de l’harmonisation , le projet de loi prévoit donc d’aligner, au 1er janvier 2022 , le délai de carence des arrêts maladie des non-salariés agricoles sur celui des assurés du régime général. En pratique, l’entrée en vigueur de cette mesure à cette date nécessiterait toutefois l’intervention d’un décret modifiant l’article D 732-2-2 précité.
À défaut de remplaçant, les chefs d’exploitation bénéficieraient d’IJ paternité
Projet art. 48, I-5° et III : En cas de naissance d’un enfant, les chefs d’exploitation et d’entreprise agricole ont droit à un congé de paternité et d’accueil de l’enfant d’une durée équivalente à celui dont bénéficient les salariés et les travailleurs indépendants, soit, depuis le 1er juillet 2021, 25 jours pour les naissances simples et 32 jours pour les naissances multiples. Durant ce congé, ils peuvent bénéficier d’une allocation de remplacement visant à rémunérer l’emploi d’une personne pour les remplacer sur l’exploitation (C. rur. art. L 732-12-1). Mais aucune indemnisation n’est prévue lorsqu’ils ne trouvent pas de remplaçant. Or, depuis le 1er janvier 2019, les cheffes d’exploitation agricole bénéficient pendant leur congé de maternité d’IJ forfaitaires lorsqu’elles ne peuvent pas bénéficier de l’allocation de remplacement (C. rur. art. L 732-10, al. 2).
C’est pourquoi, par souci d’équité , le projet de loi permettrait le versement d’iIJ forfaitaires aux chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole, en cas de congé de paternité et d’accueil de l’enfant lorsque l’allocation de remplacement ne pourrait pas leur être attribuée, faute de remplaçant. Cette disposition s’appliquerait aux indemnités relatives à des arrêts de travail pour paternité débutant à compter du 1er janvier 2022.
Autres mesures
La retraite progressive serait étendue aux salariés en forfait jours et aux mandataires sociaux
Projet art. 53 : La retraite progressive permet aux actifs proches de la retraite de faire liquider une fraction de pension de vieillesse provisoirement, tout en exerçant une activité réduite. Cette possibilité est offerte aux salariés exerçant une activité à temps partiel et aux travailleurs indépendants justifiant d’une diminution de leurs revenus professionnels dès lors qu’ils ont atteint l’âge de 60 ans et justifient d’au moins 150 trimestres d’assurance dans les régimes d’assurance vieillesse.
Le projet de loi prévoit d’étendre le champ des bénéficiaires de ce dispositif et d’en modifier certaines conditions d’application en vue, notamment, de tirer les conséquences d’une décision récente du Conseil constitutionnel, les nouvelles dispositions devant entrer en vigueur le 1er janvier 2022 (sous réserve de la publication du décret devant préciser différents points).
Une extension aux salariés au forfait annuel en jours…
Le Conseil constitutionnel a censuré , pour inégalité devant la loi, les dispositions de l’article L 351-15 du CSS relatives à la retraite progressive se référant aux salariés exerçant une activité à temps partiel au sens de l’article L 3123-1 du Code du travail, dans la mesure où, celui-ci exprimant le temps partiel en heures, elles avaient pour effet d’en exclure les salariés en forfait jours (Cons. const. 26-2-2021 n° 2020-885 QPC : JO 27). Les Sages ont toutefois reporté l’abrogation des dispositions jugées inconstitutionnelles au 1er janvier 2022 afin de laisser au législateur le temps de procéder à l’adaptation des textes , sans quoi le dispositif ne serait plus accessible aux salariés à compter de cette date.
Le projet de loi prévoit d’ajouter à la notion de temps partiel celle de temps réduit . Seraient donc visés tous les salariés exerçant une activité professionnelle d’une durée inférieure à la durée maximale légale, réglementaire ou conventionnelle, que celle-ci soit exprimée en jours ou en heures.
En plus des conditions visées ci-dessus, l’assuré serait tenu de justifier d’une quotité de travail comprise entre 2 limites qui seraient fixées par décret en Conseil d’État.
… et aux travailleurs non salariés relevant du régime des salariés
Il est par ailleurs proposé d’ouvrir le bénéfice de la retraite progressive aux travailleurs non salariés relevant des régimes de salariés, c’est-à-dire exerçant une des activités mentionnées à l’article L 311-3 du CSS pour le régime général et à l’article L 722-20 du Code rural et de la pêche maritime pour le régime agricole. Seraient en particulier concernés les mandataires sociaux .
Les intéressés ne seraient pas soumis à une condition de durée d’activité, mais devraient en revanche exercer leur activité à titre exclusif et justifier d’une diminution de leurs revenus professionnels dans des conditions qui seraient fixées par décret.
Des conditions d’application précisées
Le projet de loi prévoit de préciser que l’activité à temps partiel ou à temps réduit devrait être exercée à titre exclusif . Le cumul d’emplois à temps partiel ou à temps réduit auprès de plusieurs employeurs serait toutefois possible dans des conditions déterminées par décret.
Actuellement, les textes prévoient que le service de la fraction de la pension est suspendu lorsque l’assuré reprend une activité à temps complet. Selon le projet de loi, il serait à l’avenir supprimé dans cette hypothèse. En revanche, le service de la fraction de la pension serait suspendu lorsque les autres conditions pour en bénéficier ne seraient plus réunies.
Un recours assoupli au Tese ou au CEA
Projet art. 11, I-6° et IV : Le projet de loi prévoit d’assouplir les conditions de recours au titre emploi-service entreprise (Tese) et au chèque-emploi associatif (CEA). Actuellement, les entreprises, associations ou fondations adhérant à l’un de ces deux dispositifs simplifiés de déclaration et de recouvrement de cotisations et contributions sociales sont obligées de l’utiliser pour l’ensemble de leurs salariés (CSS art. L 133-5-6, al. 11). L’article 11 du projet de loi supprimerait cette règle à compter du 1er janvier 2024. D’après l’exposé des motifs, l’objectif est de simplifier les démarches administratives de l’employeur et de faciliter l’embauche de salariés occasionnels pour des emplois de courte durée ou en remplacement de salariés absents, même s’il n’utilise pas le Tese ou le CEA pour son personnel permanent.
Le droit de communication des organismes de sécurité sociale serait facilité
Projet art. 15 : L’article 114-19 du CSS prévoit un droit de communication permettant aux agents des organismes de sécurité sociale, dont les agents de contrôle des Urssaf , d’obtenir des informations et documents directement auprès de tiers (organismes, entreprises, établissements bancaires…), sans que s’y oppose le secret professionnel. L’article 15 du projet de loi vise à faciliter l’exercice du droit de communication en permettant à l’agent de contrôle de demander aux tiers de lui transmettre les documents et informations requis par voie dématérialisée.